Mépris à la française
Par Mrizek Sahraoui – Dans cette France qui chancelle, le leader de la CFDT, connu pour sa modération, a dénoncé une «forme de mépris», celui de la CG un «déni de démocratie». Des déclarations incendiaires à l’endroit du pouvoir macroniste alors que la loi controversée sur les retraites revient au Parlement pour adoption définitive. Ce jeudi, cette réforme portée sur les fonts baptismaux par Emmanuel Macron connaîtra son épilogue pour l’heure imprévisible.
Imprédictible, parce que celle-ci pourrait essuyer un rejet pur et simple, être votée mais sûrement après un score étriqué, ou encore passer grâce à l’article 49/3 de la Constitution. L’article décrié qui permet à la Première ministre d’engager son gouvernement pour une adoption du texte sans vote, synonyme, aux yeux des syndicats et même de la majorité des Français, de mépris et de déni de démocratie.
Le projet est, ce mercredi, sur la table de la Commission mixte paritaire (CMP), commission hors-sol, a fustigé un parlementaire membre de celle-ci. Avant d’atterrir, demain jeudi, à l’Assemblée nationale pour un vote solennel, à coup sûr dans un climat d’extrême tension. Car l’enjeu est majeur. A la fois pour le gouvernement, donc pour le président Macron lui-même qui, si au terme d’une séance plénière qui fera date la majorité présidentielle venait à essuyer un camouflet, alors il n’y a – il n’y aurait – pas loin du Capitole à la Roche Tarpéienne.
Et l’enjeu est également de taille pour l’opposition, tous bords politiques confondus. A l’exception de la droite (LR), laquelle est tiraillée entre, d’une part, ceux qui ont prêté allégeance à Emmanuel Macron et voteront la loi, et, de l’autre, les quelques frondeurs et les indécis (un peu plus d’une vingtaine à cette heure) qui refusent le diktat macroniste, déterminés, parce qu’ils disent ne pas ne pas avoir été entendus, à (lui) infliger le supplice de Tantale.
Quelque en sera l’issue du vote, que la réforme passera ou non, Emmanuel Macron a déjà échoué, s’accordent à souligner les observateurs. Un échec fruit d’une politique menée à rebours des aspirations du peuple français qui vient s’ajouter aux nombreux autres fiascos enregistrés sur les plans national et international. La France a fait du sur-place, c’est peu dire, tout au long du règne d’Emmanuel Macron en passe de battre le record d’impopularité dans l’histoire de la Ve République, aussi bien dans son propre pays comme, fait inédit, à l’étranger, de façon plus manifeste en Afrique.
Outre les couacs, les bourdes, les provocations et les agressions verbales récurrentes contre les Français mais aussi à l’encontre de pays souverains, qui ont émaillé son premier mandat et le début du second, dont la presse française et internationale en ont largement fait écho, le grand pari perdu du président Macron, c’est d’avoir été incapable d’éradiquer l’extrême droite comme il s’y était engagé en 2017. Non seulement il n’a pas tenu sa promesse mais, plus grave encore, l’extrême droite a réussi à envoyer 89 députés au Parlement, à faire élire un vice-président qui, par sa fonction, accède désormais au perchoir.
C’est dire la régression politique.
L’extrême droite est sur le chemin de l’Elysée, a analysé le journal britannique le Times ; l’économie française toussote ; le couple franco-allemand en rade sur le Rhin ; la diplomatie française inscrite aux abonnés absents quand elle n’est pas priée de fermer boutique (un internaute écrit avec ironie : il faudra compter le nombre de représentations diplomatiques françaises encore présentes en Afrique au terme du mandat d’Emmanuel Macron) ; Paris croule sous des tonnes d’ordures ; les précaires bénéficiant de l’aide alimentaires se chiffrent en millions de demandeurs, selon les associations caritatives ; les salariés peinent à boucler les fins de mois ; la viande et le poisson frais emballés sont mis sous antivol, vu la montée exponentielle des vols à l’étalage en raison d’une inflation galopante ; la France grelotte, conséquence d’une imprudente posture géopolitique dans le conflit en Ukraine.
Tel est le bilan (partiel, faut-il le noter) de celui qui vint trop tôt et dut rester trop longtemps, serions-nous tenté de dire.
M. S.
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