Qu’est-ce que l’Algérie a obtenu de la France pour renvoyer Moussi à Paris ?
Par Abdelkader S. – L’annonce faite par le président Tebboune, ce jeudi, à la chaîne qatarie Al-Jazeera relative au retour imminent de l’ambassadeur d’Algérie à Paris fait s’interroger de nombreux observateurs sur les raisons qui ont conduit à cette décision inattendue. Certes, explique-t-on, la crise née de l’affaire Bouraoui devait, comme toutes les précédentes, connaître un épilogue, mais la France aura-t-elle, encore une fois, obtenu des autorités algériennes une sorte de «rémission» sans que Paris ait fait quelque geste d’apaisement ?
Cela fait moins d’un mois que Saïd Moussi a été rappelé à Alger pour «concertations», une formule diplomatique qui signifie, en vrai, une forme de contestation à l’égard de Paris qui a commis un énième acte hostile, en exfiltrant un de ses agents à travers la Tunisie avec l’aide de l’ambassade de France à Tunis et de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), que dirige l’ancien ambassadeur de France à Alger Bernard Emié. La colère d’Alger aura été plus courte que la précédente. Mais qu’est-ce qui explique ce revirement ?
La France va-t-elle extrader Amira Bouraoui et une poignée d’activistes qui mènent une campagne acharnée contre les institutions algériennes à partir du territoire français et qui sont réclamés par la justice algérienne ? Va-t-elle interdire la chaîne que dirige le fils de l’ancien chef de file du parti extrémiste FIS, Al-Magharibia, qui, étrangement, bien qu’émettant à partir de la capitale française, ni n’entend ni ne voit les millions de Français qui manifestent contre le pouvoir en place et exigent la destitution du président Macron et la police qui réprime à tout-va sur ordre du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et de ses préfets qui ont, depuis l’intervention télévisée du locataire de l’Elysée, carte blanche pour mater la contestation ?
Aucun geste d’apaisement n’est pourtant venu cette fois-ci d’un Emmanuel Macon empêtré dans une crise sociale dont on voit qu’elle va crescendo et qu’elle risque de déboucher sur une confrontation qui s’installera dans la durée et pourrait conduire à une désobéissance civile durable et dont on aperçoit clairement les signes avant-coureurs – émeutes, blocages, grèves, manifestations, etc.
Le retour annoncé de l’ambassadeur d’Algérie à son poste à Paris coïncide, par ailleurs, avec la désignation par le Quai d’Orsay du remplaçant de François Gouyette, admis à la retraite, en la personne de Stéphane Romatet, selon des sources médiatiques qui croient savoir que ce diplomate de 63 ans, qui est passé par Le Caire, a été nommé officiellement ce mercredi 22 mars.
Il y a peu de chances que la France livre les personnes dont l’Algérie demande l’extradition, pensent les observateurs avisés. Qu’est-ce qui justifie le retour de Moussi dans ce cas ? Le président de la République n’en a donné aucune explication lors de son entretien avec la chaîne Al-Jazeera à laquelle il a réservé la primauté de l’information. Les plus hautes autorités semblent donc avoir tourné la page, en attendant une énième provocation de la part des Français, habitués aux forfanteries dans leurs relations avec leurs anciennes colonies.
A. S.
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