Quand l’Elysée fait dire au président Tebboune ce qu’il ne peut pas avoir dit
Par Karim B. – L’agence de presse officielle française est revenue sur le communiqué de l’Elysée qui avait sanctionné l’entretien téléphonique entre les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune qui avait précédé le retour de l’ambassadeur d’Algérie en France. Dans sa reprise de l’annonce faite par la Présidence de la République algérienne d’un nouvel échange entre les deux chefs d’Etat, ce dimanche, fixant la seconde moitié du mois de juin pour le déplacement de Tebboune à Paris, alors que le voyage était prévu initialement début mai, l’AFP a notamment rappelé le passage relatif à l’affaire Bouraoui. «Les deux chefs d’Etat ont échangé sur les conditions du départ de Tunisie et d’arrivée en France, avec le soutien de nos services consulaires en Tunisie, d’une ressortissante franco-algérienne, le 6 février dernier. Cet échange a permis de lever les incompréhensions. Ils sont convenus de renforcer les canaux de communication entre les administrations concernées pour éviter que se renouvelle ce type de malentendus regrettables.»
Le terme «incompréhensions» a été façonné dans les laboratoires linguistiques de la Présidence française qui a cherché ainsi à minimiser le comportement gravissime du Quai d’Orsay et l’implication flagrante de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE, service d’espionnage) dans ce que les autorités algériennes avaient qualifié d’«acte inamical». Et les actes inamicaux, la France officielle ne cesse d’en commettre. Si bien, d’ailleurs, que d’aucuns estiment que rien ne dit que le président Tebboune se rendrait en France fin juin comme cela a été annoncé officiellement. A moins qu’un accord ait été trouvé sur le cas des éléments des mouvements Rachad (islamiste) et MAK (indépendantiste) réclamés par la justice algérienne. Quid du cas Amira Bouraoui ? Sera-t-elle extradée ou l’Algérie a-t-elle passé l’éponge sur cette affaire qui, pourtant, résonne comme une atteinte à la souveraineté algérienne ?
Il est, en tout cas, impossible que la partie algérienne ait considéré l’exfiltration de l’activiste algérienne comme une simple «incompréhension» pour qu’elle tourne la page aussi facilement, même si l’Elysée a tenté d’édulcorer son communiqué en évoquant un supposé «renforcement des canaux de communication […] pour éviter que se renouvelle ce type de malentendus regrettables.» «Malentendu regrettable», affirme Paris. Autrement dit, une banale divergence d’interprétation entre deux Etats qui croyaient se comprendre. Mais une «banale divergence» conduit-elle au rappel d’un ambassadeur aux fins de consultations ? Qui peut y croire ?
La question demeure de savoir si le président Tebboune ira ou n’ira pas en France ce mois de juin, d’autant plus que la fronde sociale en France va en s’accentuant et que, avec, sinon l’aide du moins la permissivité évidente de ceux qui protègent et entretiennent les activistes algériens installés en France, ces derniers pourraient être encouragés à chahuter la visite officielle du chef de l’Etat algérien sous le prétexte de la liberté de manifester. Une liberté de manifester permise pour certains et interdite pour d’autres au pays de la «liberté» er des «droits de l’Homme».
K. B.
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