Gaza, Jénine, Naplouse : les tranchées de la résistance !
Une contribution d’Ali Akika – L’armée israélienne a l’habitude de faire des incursions rapides à l’aide de ses commandos chargés de neutraliser des «terroristes» palestiniens. Mais le lundi 3 juin, il a fallu quelque 2 000 soldats soutenus par une armada d’équipements militaires et une protection aérienne pour réussir «l’exploit» de tuer 13 combattants palestiniens, de faire plus de 100 prisonniers et de chasser de leurs maisons 3 000 habitants pour bombarder à leur guise des quartiers et éviter ainsi à affronter l’ennemi dans des combats de rue. L’attaque de Jénine est à décoder à partir de deux déclarations de Netanyahou. La première faite au quartier général de son armée avec son ministre de la Défense à ses côtés. Il annonça que l’attaque de Jénine qui devait se terminer en fin de journée sera prolongée de 24 heures. C’est là le signe que la résistance palestinienne pose quelques problèmes à l’«invincible» armée israélienne.
La deuxième déclaration de Netanyahou eut lieu à l’ambassade américaine où l’on fêtait l’Indépendance Day (anniversaire de l’indépendance des Etats-Unis). Il déclara donc dans ce lieu (l’ambassade américaine territoire américain, selon les règles diplomatiques) : «Nous devons rétablir nos capacités de dissuasion.» Cette seconde phrase dans la même journée donne une idée de l’impasse politique et militaire d’Israël dans un Moyen-Orient où l’Oncle Sam a quelque peu perdu de sa superbe. Et ce mardi 4 juillet, la bataille fait encore rage, selon les dépêches de la presse que confirme l’hystérie des actes de l’armée d’occupation. Celle-ci tire sur les journalistes, force la population à quitter les maisons pour donner libre cours à sa rage, en bombardant les combattants qui opposent une farouche résistance dans tout Jénine.
Cerise sur le gâteau, elle annonce un mensonge éhonté sur une prétendue collaboration de l’Autorité palestinienne pour créer des tensions entre combattants. Nous sommes le deuxième jour de l’attaque, si Netanyahou prolonge à nouveau son agression d’un jour, ça signifie un échec cuisant et Jénine deviendra une deuxième Gaza où l’armée israélienne se contentera de la bombarder du haut du ciel protecteur sans y mettre un pied.
Et si l’on ajoute la manifestation d’Israéliens dans cette journée du 3 juillet devant l’aéroport international d’El-Qods (Jérusalem), on remarque que l’Etat d’Israël voit surgir devant lui l’Histoire sur laquelle il a été fondé. Primo, un mythe religieux transformé en entreprise coloniale et un pays, la Palestine, conquise et son peuple éparpillé chez ses voisins ou bien exilé sur sa propre terre mais toujours combattant. Et ce long fleuve appelé Histoire dont les eaux coulent à une époque qui ouvre un nouvel horizon pour les peuples encore colonisés ou encore dominés par le biais de l’économie aux mains du gendarme du monde. C’est cette Histoire qui nous fait toucher du doigt qu’un pays comme la Palestine, c’est, certes, une géographie mais aussi, et surtout, que ses habitants forment un peuple, c’est-à-dire un sujet de sa propre histoire. Israël est en train d’en faire l’expérience car ni l’exil ni les murs qui ceinturent villes et villages palestiniens n’ont mis fin au rêve de retrouver la terre de Palestine. Israël sait à présent que la géographie n’est pas un obstacle infranchissable et que les frontières naturelles, fleuves et montagnes se traversent et l’intelligence et la technologie rendent possible la vie sous terre. Gaza en donne l’exemple et Israël n’a jamais remis les pieds dans ce bout de Palestine évacué en 2005. Deux obstacles, militaire et politique, calment les envies d’Israël d’en découdre avec ces «terroristes» de Gaza. Aujourd’hui, Gaza ceinturée de barbelés, surveillée du ciel n’est plus seule, elle reçoit l’appui de Jénine et de Naplouse. Les Palestiniens ont mis du temps à construire une dissuasion bien que modeste fait réagir Netanyahou. Les Palestiniens instruits par leur culture et l’histoire se sont alliés avec le temps qui leur offrit son premier fruit un jour de mars de l’an 1968. Ce jour-là, une féroce bataille de Karamé en Jordanie les opposa à l’armée israélienne qui abandonna pour la première fois des chars sur le champ de bataille. Quarante ans plus tard, ces chars beaucoup plus sophistiqués, appelés Merkava, se sont retrouvés dans le musée de la Résistance du Hizbollah. Ce butin de guerre tomba entre les mains de la résistance libanaise l’été 2006 et, depuis, l’«invincible» armée israélienne n’a plus foulé le sol libanais…
Ce bref rappel historique a pour but de faire doucher les illusions de ceux qui pensent, pensaient, avoir enterrée la Palestine avec les «Accords d’Abraham». Comme si les monarchies féodales étaient les véritables sujets de l’histoire. Ils oublient un peu trop vite l’histoire des monarchies en Egypte, en Irak, au Yémen présentes de nos jours, uniquement dans les livres scolaires. Hier, ces monarchies marchandaient leur sécurité contre leur silence ou leur bégaiement sur les droits des Palestiniens. Aujourd’hui, la guerre en Ukraine a remis les pendules à l’heure. Les peuples ne se laissent pas enfermer dans des réserves comme le furent, hélas, les Amérindiens d’Amérique. Tout peuple qui demeure sur ses terres finit par recouvrer ses droits souverains. Heureusement que les Palestiniens ne sont pas tombés dans tous les pièges que l’entreprise coloniale leur a tendus. Israël compta sur l’assimilation des Palestiniens dans les pays voisins pour des raisons évidentes d’histoire, de culture, de langue, de religion… Il facilitait leur installation dans des pays amis et lointains connus pour leur capacité d’intégration et le temps qui passe ferait le reste…
En dépit de la guerre en Ukraine qui accapare l’attention des opinions et de la diplomatie internationale, ce qui se passe en Palestine et, d’une façon générale, au Moyen-Orient est d’une grande importance à la fois sur le plan politique et militaire. La «gestion» politique du problème de la Palestine est un échec pour plusieurs raisons. Primo, Israël ne respecte nullement le droit international qu’il revendique uniquement et à grand cri pour sa «légitimité». Même les accords qu’il signe avec l’OLP, Israël les viole, les bafoue chaque jour, assuré qu’il est par les généreuses garanties de ses protecteurs. Sauf que ces derniers ayant vu de quel côté penchent le cœur et les intérêts des peuples ont été surpris de voir les monarchies du Golfe regarder ailleurs. Et c’est précisément les bouleversements géostratégiques, présence de nouvelles puissances et signatures d’accords économiques et financiers en dehors du dollar, qui vont changer les données dans cette région. Et la justesse des droits de la Palestine qui soutiennent la lutte politique et militaire finiront par ébranler l’arrogance d’Israël empêtré dans ses guéguerres religieuses et byzantines à une époque où la boussole du monde s’appelle Politique et rapports de force…
On le voit en Ukraine où les petits soldats de la désinformation et les «experts» se rendent comptent que leurs analyses reposent sur du vent et de leurs délires et non sur les rapports de force sur le terrain. Il n’est pas loin le jour où ces petits soldats se réveilleront et découvriront les secrets qui les ont poussés à raconter tant de bêtises et de Co aussi sur la Palestine. Ce jour-là, justice sera faite pour les Palestiniens et nos «experts» comprendront enfin pourquoi leur monde se meurt…
A. A.
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