Dure déconstruction de la Françafrique ou l’empire qui ne veut pas mourir
Par Khaled Boulaziz – A Paris, on entend de toute part le même refrain : «La Françafrique est morte et enterrée !» Pourtant, de Ouagadougou à Libreville, de Dakar à Yaoundé, de Bamako à Abidjan, la jeunesse se révolte contre ce qu’elle perçoit comme une mainmise française sur son destin.
Quinze ans après la Seconde Guerre mondiale, la France a officiellement concédé l’indépendance à ses anciennes colonies africaines. Une liberté en trompe-l’œil. En réalité, Paris a perpétué l’Empire français sous une autre forme : la Françafrique. Un système où se mêlent des mécanismes officiels, assumés, revendiqués (militaires, monétaires, diplomatiques, culturels…) et des logiques de l’ombre, officieuses, souvent criminelles.
Un système érigé contre les intérêts des peuples, avec l’assentiment d’une partie des élites africaines et qui profite toujours aux autocrates africains «amis de la France». Un système que tous les présidents français ont laissé prospérer, en dépit des promesses de «rupture».
A cet effet, on peut voir comment le pouvoir français a utilisé divers dispositifs pour maintenir son influence et son contrôle sur les anciennes colonies africaines. Ces dispositifs entrelacent des accords économiques et militaires, des liens avec les élites locales, des interventions dans les affaires politiques internes et des réseaux d’influence informels. Cet agencement a créé une dépendance des pays africains envers la France, contribuant ainsi à la perpétuation de la Françafrique malgré les promesses d’indépendance formelle.
Au cœur de cette Françafrique, on peut observer également aussi comment les élites africaines complices ont été cooptées par le système et ont contribué à la diffusion de l’idéologie d’un néocolonialisme prédateur auprès de la population. Cela s’est manifesté par la promotion de la culture française, l’adoption de politiques économiques favorables à la France, et la répression des mouvements de résistance qui remettent en question la relation d’emprise. On ne mettra jamais assez en lumière sur les multiples facettes apparentes et cachées de cette prépondérance qui maintient cet empire du mal en place.
Aux quatre coins de ce vaste continent, la jeunesse africaine se soulève contre la Françafrique car elle ressent les conséquences néfastes de cette mainmise sur son destin. Malgré l’indépendance arrachée au prix d’immenses sacrifices, la grande majorité des peuples africains est en proie à des problèmes tels que la corruption, la pauvreté, l’instabilité politique et économique, ainsi que des violations des droits de l’Homme.
Les mécanismes de pouvoir et de contrôle mis en place par la Françafrique ont permis à certains autocrates africains «amis de la France» de maintenir leur mainmise en échange de la perpétuation du statu quo qui favorise les intérêts français. Cela a souvent été aux dépens du bien-être des populations locales et des aspirations démocratiques.
La jeunesse africaine est de plus en plus consciente de cette réalité. Elle se mobilise pour exiger des changements profonds dans la relation entre la France et l’Afrique, et pour réclamer une véritable indépendance politique, économique et culturelle. Elle conteste l’hégémonie culturelle imposée par la Françafrique et cherche à redéfinir son identité, en valorisant ses propres langues, cultures et traditions.
Cette jeunesse marchant sur les pas de Fanon et Sankara remet en question les dispositifs de contrôle et de surveillance qui ont été mis en place pour maintenir la Françafrique. Elle prend conscience de l’injustice et de l’oppression inhérentes à ce système et cherche à les démanteler. Cette résistance ne se limite pas aux manifestations et aux protestations, mais s’étend également aux réseaux sociaux et aux nouvelles formes d’expression qui permettent à la voix des jeunes Africains de se faire entendre au-delà des frontières nationales.
Cette jeunesse cherche également à renverser l’hégémonie culturelle de la Françafrique en favorisant la prise de conscience politique et en promouvant des idées alternatives. Elle œuvre pour la construction d’un nouveau récit national qui ne soit plus subordonné aux intérêts français, mais qui mette en avant les valeurs de liberté, de démocratie, d’égalité et de développement inclusif.
Cependant, le chemin vers la déconstruction de la Françafrique est semé d’embûches. Les intérêts économiques et politiques puissants derrière ce système de domination sont résistants au changement et cherchent à maintenir leur emprise. De plus, certains acteurs locaux, ayant bénéficié de leur proximité avec le pouvoir français, pourraient également s’opposer aux mouvements de changement.
La remise en question de la Françafrique par la jeunesse africaine est une lutte contre l’oppression, la dépendance et l’injustice. C’est une quête de souveraineté, de dignité et de progrès, guidée par des idéaux de liberté et de souhait de définir son propre destin. Cette lutte pour la décolonisation mentale et effective reste essentielle pour façonner un avenir où l’Afrique peut s’affirmer pleinement et s’épanouir en tant qu’acteur souverain et autonome sur la scène internationale.
Ainsi, malgré les résistances conservatrices, la jeunesse africaine au Niger et ailleurs est déterminée à créer un avenir meilleur est irrésistible. Son élan vers un changement positif ne cesse de grandir, et cette vague de transformation sociale, politique et culturelle est en marche, annonçant la fin inévitable de cet Empire du mal qu’est la Françafrique.
K. B.
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