L’islamisation gagne à nouveau du terrain en Algérie : les femmes premières victimes
Par Kahina Bencheikh El-Hocine – L’islamisation rampante a gagné du terrain ces dix dernières années et pris une place importante chez beaucoup d’Algériens. Si le terrorisme islamiste a été vaincu militairement, il n’en demeure pas moins que son idéologie subsiste sans érosion. Et nul besoin de bombe ou d’arme blanche pour soumettre religieusement l’Algérien.
La pensée islamiste rigoriste a prospéré et s’est fortifiée au fil des années face à un laxisme déconcertant, à la limite consentant, des pouvoirs publics. Les réseaux sociaux, refuge incontesté des illuminés de la religion et qui ont remplacé le prêche des mosquées des années 1990, ont eu la part du lion dans la prolifération fulgurante de l’islamisme radical dans le pays.
Ces fanatiques zélés, suivis par des centaines, voire des milliers de fans, se proclament d’une grande érudition et ce dans un environnement où le contrôle des autorités est quasi inexistant. Nul besoin d’être un sociologue pour percevoir l’islamisation de la population algérienne dans tous les aspects de la vie quotidienne, et la femme algérienne en fait les frais au quotidien.
Les plages sont évidemment parmi les lieux où la femme qui ne porte pas le voile n’a pas sa place. Des campagnes islamistes ont été lancées sur le web dès l’entrée en vigueur de la saison estivale et dont l’objectif est d’interdire les maillots de bain.
Les islamistes imposent leur loi sur toutes les plages publiques du pays. Ni le short et encore moins le maillot de bain ne sont tolérés au risque de se faire lyncher et forcée à quitter la plage. Et à en croire les réseaux sociaux, l’anathème est même jeté sur le burkini, qui renvoie, pourtant, à une conception rigoriste de l’islam.
«Couvrez vos corps que nous ne saurions voir, mettez des djellabas, car par pareils objets les âmes sont blessées», semblent dire ces fanatiques frustrés.
Les femmes à maillot de bain fréquentent généralement les plages privées, mais avec les prix affichés, les bourses de certaines ne peuvent se le permettre.
«C’est tout de même inouï qu’on ne puisse pas se baigner librement dans notre propre pays !» s’écrie une quadragénaire rencontrée sur une plage publique à Tipaza, alors qu’une autre se demande, énervée : «Que fait l’Etat ? Qu’en est-il des libertés individuelles tant sacralisées ?» Une maman accompagnée de ses filles, qui, à peine arrivée, fait demi-tour en fustigeant cet état de fait : «Comment voulez-vous vous baigner en paix avec des énergumènes pareils qui font la loi sans que les autorités réagissent ?»
Certaines venues en groupes se désolent de cette situation inextricable. «On nous incite à passer nos vacances chez nous et à aider à l’essor du tourisme. C’est tout simplement utopique», assure l’une d’elles, dépitée. Et de renchérir : «Nous les femmes n’avons plus notre place chez nous, comment voulez-vous qu’une étrangère s’y retrouve ?»
Le malaise est palpable, et la consternation de ces femmes qui refusent de se plier au diktat de cette police religieuse est à son comble. «Avec cette mentalité intégriste, il n’y aura jamais de tourisme en Algérie», clame une maman laquelle refuse à ses filles de se mettre en maillot de bain au risque de provoquer ces nervis religieux. «Trouvez-vous normal d’aller dans un autre pays pour espérer retrouver la paix et profiter de la mer à sa guise ?» interroge-t-elle.
La femme algérienne n’a pas cessé de lutter contre ce conservatisme social, le combat avec force et détermination mais sans que l’oppression qu’elles subissent ne soit visible, ni nécessite l’intérêt des autorités. Jusqu’à quand ?
K. B. E. H.
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