Les Occidentaux atlantistes ouvrent un second front de guerre à nos frontières
Une contribution de Khider Mesloub – Dans notre livre anti-guerre impérialiste actuelle, intitulé Chroniques contre la guerre généralisée en cours, édité l’année dernière, nous écrivions les lignes suivantes. «Incontestablement, le monde est en voie d’«ukrainasation», autrement dit chaque Etat recèle quelque Poutine (Zelensky-Biden-Macron) va-t-en-guerre tapi dans les palais dorés présidentiels, et une population conditionnée par l’idéologie militariste actionnée par quelque Poutine (Zelensky-Biden-Macron) pour, au nom de la défense de la patrie ou de la démocratie bourgeoise, se transformer en chair à canon. (La preuve : y compris des petits Etats africains, en pleine militarisation et radicalisation belliciste, sont prêts à lancer une offensive guerrière généralisée contre le Niger. Ce bellicisme décomplexé fait la preuve que tous les pays, grands et petits, peuvent devenir impérialistes.)
Certes, au cours des trois dernières décennies, le monde a vécu plusieurs conflits militaires sanglants, notamment en Yougoslavie, en Irak et en Syrie. Ces multiples guerres ont été provoquées par les puissances impérialistes, sans menace réelle d’escalade guerrière. Mais la guerre en Ukraine marque le premier acte de guerre dans le théâtre des opérations militaires généralisées, autrement dit de la Troisième Guerre mondiale. Cette énième conflagration militaire mondialisée est l’ultime réponse du capitalisme en crise économique. En effet, avec l’aggravation de la crise, accentuant l’exacerbation de la concurrence entre chaque capital national, la guerre généralisée constitue l’unique solution pour les puissances impérialistes rivales. Car la guerre impérialiste est une donnée permanente du capital et de l’impérialisme.
Cette précipitation vers la guerre impérialiste généralisée se confirme par la décision de la Suède et de la Finlande, pays traditionnellement «neutres», de rejoindre l’OTAN, accentuant l’encerclement de la Russie, que Poutine voulait, pourtant, desserrer par l’invasion de l’Ukraine. Elle se confirme également par la décision de la majorité des Etats d’accroître substantiellement leurs dépenses militaires, de relancer leur industrie d’armement pour les pays producteurs d’armes. Elle se confirme, pareillement, par la résurgence des alliances politiques et militaires, induisant l’exacerbation des polarisations impérialistes. Elle se confirme par l’instauration de l’austérité économique, matérialisée par des politiques antisociales décrétées par les gouvernements, la flambée de l’inflation (véritable impôt payé par tous les travailleurs), par la recrudescence de la propagande politico-idéologique, illustrée par l’exhortation aux populations d’accepter des sacrifices, à consentir de réduire leur consommation pour soutenir l’effort de guerre. Elle se confirme par le durcissement autoritaire et le tournant totalitaire de la majorité des Etats.
Nul doute, la guerre entre l’Ukraine et la Russie s’inscrit dans un conflit plus ample qui oppose, au vrai, la première puissance états-unienne à son concurrent économique actuel, la Chine, hissée à la tête des BRICS-OCS. En d’autres termes, les G7-OTAN sont devenus l’axe de regroupement du Grand capital américain, dressé contre les BRICS–OCS, l’axe de regroupement des impérialistes sino-russe.
Lénine a déclaré : «Le capitalisme est une horreur sans fin.». Notre époque, marquée par la résurgence de la paupérisation, la famine, du chômage endémique, des fléaux morbides et, surtout, de la guerre généralisée, lui donne raison. Le capitalisme est ontologiquement pathogène, belligène, mortifère, génocidaire.
La dramatique conjoncture actuelle marquée par la flambée des fléaux pathologiques (notamment la propagation des virus, des maladies psychiatriques et des morbidités multiples), par l’aggravation de la crise multidimensionnelle systémique, la prolifération des guerres et des exodes, constitue une condamnation sans appel du capitalisme. Au reste, depuis un siècle, c’est-à-dire la Première Guerre mondiale, il n’a survécu au-delà de sa mission historique que grâce à la falsification de ses lois (endettement, crédit, subventions, planches à billets), au durcissement autoritaire de son pouvoir étatique, illustré par l’instauration de modes de gouvernance fondés sur le fascisme, le nazisme, le stalinisme, la démocratie financière despotique bâtie en Occident décadent.
Le capitalisme est rentré dans sa crise terminale. Parce qu’il est incapable de poursuivre son développement normal, d’assurer sa valorisation, il lui faut instaurer des tyrannies (sous couvert de pandémie) et recourir à la guerre généralisée (sous couvert de défense de la démocratie ou de la patrie). S’il y a tyrannie sanitaire pandémique et escalade guerrière matérialisée par l’économie de guerre et le militarisme, c’est parce que le capitalisme mondialisé ne peut plus continuer de fonctionner dans la «félicité consommatrice», fondée sur le crédit intarissable des années consuméristes des quatre dernières décennies. Après l’ivresse de la consommation éthylique, les peuples, sous l’effet de la virulence de la crise économique mondiale provoquée par la baisse vertigineuse du taux de profit, se réveillent avec la gueule de bois, cette intoxication capitalistique qui provoque des nausées par sa seule existence.
Quand une formation sociale et économique amorce son déclin, cela signifie que la révolution sociale est à l’ordre du jour. Néanmoins, cette perspective révolutionnaire peut être entravée par le déclenchement d’une guerre généralisée mondialisée.» Ces lignes ont été rédigées au lendemain du déclenchement de la guerre russo-ukrainienne, au printemps 2022. Une guerre de proxy généralisée qui se déroule en Europe orientale.
Aujourd’hui, l’épicentre de la guerre semble s’élargir à l’Afrique. Une seconde guerre généralisée est sur le point d’éclater en Afrique de l’Ouest. Le récent coup d’Etat au Niger sert d’alibi au bloc impérialiste occidental pour lancer un assaut contre les intérêts russe et chinois en Afrique. Déclencher une nouvelle guerre par procuration dans le Sahel.
Tout indique que la France et les Etats-Unis, dans l’impossibilité d’intervenir directement de manière coloniale, sont derrière cette pression sur le nouveau régime militaire nigérien, qualifié de «junte» par les médias occidentaux, alors qu’il n’a rien à envier aux multiples pouvoirs africains corrompus et militarisés inféodés aux impérialismes occidentaux, à l’instar du précédent gouvernement dit «démocratique» du président Bazoum, vassal de la France.
Comment les pays occidentaux atlantistes, dont les intérêts impérialistes sont menacés par les avancées de la Chine et de la Russie en Afrique, justifient cette offensive guerrière de proxy dans ce continent africain, l’ouverture de ce nouveau front de guerre impérialiste au Sahel ? D’une part, en se drapant dans la défense de la démocratie et l’ordre constitutionnel, «bafoué par les putschistes nigériens». (Depuis quand les pays occidentaux, notamment la France et les Etats-Unis, se soucient de «l’Etat de droit» en Afrique, eux qui ont ourdi tous les coups d’Etat depuis presque soixante ans sur ce continent, détruit des pays souverains, notamment la Libye, totalement ravagée, orchestrés l’assassinat du président Mouammar Kadhafi ; sans oublier la destruction de l’Irak et le meurtre du président Saddam Hussein perpétrés par les pays atlantistes ?)
D’autre part, en exhumant le sempiternel épouvantail du «terrorisme islamiste» de son hibernation géopolitique concertée et combinée. Curieusement, après plusieurs années de mutisme médiatique à propos des multiples firmes terroristes djihadistes afro-arabo-musulmanes demeurées inactives, les médias stipendiés occidentaux, soudainement, ressuscitent, sur ordre de leurs gouvernants, ces groupuscules islamistes pour les agiter comme des épouvantails, une menace contre l’Occident. Mais, surtout, pour justifier l’ouverture d’un front de guerre impérialiste dans cette région subsaharienne exsangue, frappée par la sécheresse et la famine. Inévitablement, encore une fois, les peuples africains serviront de chair à canon pour assouvir les ambitions des galonnés mafieux, ces serviteurs galants des puissances impérialistes rivales.
Au vrai, ce bras de fer entre les nouveaux maîtres galonnés du Niger, tous alliés de la France (donc de l’Occident), il y a encore à peine un mois, et les pays membres de la CEDEAO, soutenus par Paris et Washington, suinte l’hypocrisie politique et diplomatique. Il est l’expression de l’enfoncement de l’Afrique dans le chaos sanglant, dans l’engrenage de la barbarie guerrière. Et plus globalement, l’enfoncement du monde capitaliste dans la phase finale de sa décadence, celle de sa décomposition. En tout cas, avec l’ouverture de ce nouveau front de guerre initiée par les puissances impérialistes, l’Union africaine risque d’imploser.
Deux perspectives sanglantes se présentent aux pays africains embarqués dans ce nouveau conflit armé : l’implosion, sous la pression américano-française belliciste, bloc atlantiste déterminé à entraver et neutraliser l’expansion économique de la Chine et de la Russie en Afrique, en transformant tout le continent en charniers et ruines. Ou la fronde militariste, à l’imitation du triumvirat Niger-Mali-Burkina (auquel vient de se joindre un quatrième «larron» : la Guinée), pour déjouer les visées impérialistes des pays occidentaux. Deux perspectives sanglantes, destructrices. Car portées par des classes dirigeantes capitalistes rivales agonisantes foncièrement bellicistes, ennemies de l’humanité, condamnées par l’histoire.
Une chose est sûre, la guerre mondialisée se précise et se concrétise. Après l’Europe orientale, et dorénavant l’Afrique de l’Ouest, prochain champ de bataille : l’Asie, précisément Taïwan.
Cela étant, en s’impliquant dans la nouvelle guerre subsaharienne, l’Algérie, ciblée par les pays atlantistes, tombera dans le piège tendu par l’état-major de l’OTAN : devenir, de facto, selon le vœu belliqueux des puissances impérialistes occidentales, pays belligérant à combattre et à abattre pour faire main basse sur ses richesses pétrolières et gazières et, corrélativement, affaiblir la Russie et la Chine, ses principaux partenaires économiques et fournisseurs militaires.
La classe prolétarienne mondiale parviendra-t-elle à déjouer et torpiller la guerre impérialiste généralisée en cours ? Mieux, à renverser le mode de production capitaliste belligène ? That is the question ! Ou plutôt : his is its historical mission !
K. M.
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