God save Africa !
Une contribution d’Aziz Ghedia – Un adage bien connu dit : «Le linge sale doit être lavé en famille.» De mon point de vue, pour avoir enfreint ce principe, le président déchu du Niger, Mohamed Bazoum, ne mérite pas que des pays, de la CEDEAO ou d’ailleurs, se décarcassent, se donnent tant de peine, au risque de mettre toute l’Afrique sens dessus-dessous pour le réintégrer dans ses fonctions et rétablir ainsi «l’ordre constitutionnel». N’étant pas nigérien, je ne devrais, logiquement, pas me prononcer sur cette question ni m’immiscer dans ce débat. Mais je me mouille, je me jette dans cette arène aux lions de l’Afrique pour dire tout simplement qu’il ne le mérite pas.
Voilà, mes propos sont peut-être choquants mais ils ont le mérite d’être francs et directs. Pourquoi, me diriez-vous ? Eh bien pour la simple raison qu’il a appelé, dans une lettre adressée au journal Washington Post, à l’intervention étrangère contre son pays. En quelques mots, voilà ce qu’il disait «J’écris ceci à titre d’otage. Le Niger est attaqué par une junte militaire qui s’efforce de renverser notre démocratie, et je ne suis que l’un des citoyens qui, par centaines, ont été emprisonnés arbitrairement et illégalement. Ce coup d’Etat, lancé contre mon gouvernement par une faction de l’armée le 26 juillet, n’a pas la moindre raison d’être. S’il aboutit, les conséquences seront dévastatrices pour notre pays, notre région, et le monde entier.»
Dans cette lettre dont j’ai pu lire quelques extraits sur Le Courrier international, plus loin, Mohamed Bazoum ajoute : «En ces heures difficiles, j’appelle le gouvernement des Etats-Unis et l’ensemble de la communauté internationale à nous aider à restaurer l’ordre constitutionnel.»
Voilà qui est clair et net. De quelle façon, pense-t-il que la «communauté internationale» pourra l’aider ? En allant supplier les putschistes de le remettre sur le trône du Niger ? Est-il naïf à ce point-là. N’est-il pas conscient du fait que si cette communauté internationale devait intervenir, c’est pour provoquer un chaos non seulement dans son pays, le Niger, mais dans tout l’ensemble de la région du Sahel ? Croit-il vraiment que les pays auxquels il fait appel dans sa missive s’intéressent à lui et vont, en conséquence, intervenir pour sauver la démocratie dont il parle ? L’intervention de ces pays n’apportera rien de bon au Niger. Elle risque même de provoquer un embrasement généralisé à toute la région du Sahel qu’il sera très difficile d’éteindre par la suite. C’est pourquoi il serait, de notre point de vue, sage d’appeler plutôt à la retenue et à la poursuite des négociations politiques, diplomatiques pour trouver une issue heureuse à cette crise nigérienne.
Presque un mois depuis le putsch, les bruits de bottes commencent à se faire entendre. La CEDEAO se dit prête à intervenir ; elle n’attend, semble-t-il, que les ordres qui doivent émaner d’une certaine partie en dehors du continent africain. Joignons les doigts et répétons tous ensemble : «God save Africa !»
A. G.
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