Le gouvernement de Dbeibah reconnu par l’Algérie normalise-t-il avec Israël ?
Par Kamel M. – Le gouvernement libyen d’Abdelhamid Dbeibah, reconnu par l’Algérie, est-il en train de normaliser ses relations avec Israël ? Sinon, comment interpréter la rencontre qui vient d’être annoncée par i24 News entre le ministre israélien des Affaires étrangères, Eli Cohen, et son homologue libyenne, Najla Mangoush, la semaine dernière à Rome, sous l’égide du chef de la diplomatie italienne, Antonio Tajani ? Le média franco-israélien, qui qualifie cette initiative d’«historique», précise que c’est «la toute première rencontre entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays».
«Les ministres ont discuté des liens historiques entre les deux nations, de l’héritage des juifs libyens, de la possibilité d’une coopération entre les deux pays et de l’aide humanitaire israélienne», indique i24 News qui se réfère à un haut responsable israélien présent à cet événement, tenu secret jusqu’à ce dimanche. Quant au ministre israélien des Affaires étrangères, il a affirmé que cette réunion «est la première étape dans les relations entre Israël et la Libye», en ajoutant que «la taille et la situation géographique de la Libye confèrent aux relations avec elle une importance et un potentiel énormes pour l’Etat d’Israël». Eli Cohen a également fait savoir que son pays «travaille avec une série de pays du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Asie dans le but d’élargir le cercle de la normalisation d’Israël».
La Libye en fait clairement partie, d’autant plus qu’i24 News révèle que, durant les dix dernières années, soit après le renversement brutal du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, Israël et la Libye «ont entretenu des contacts secrets par l’intermédiaire du ministère des Affaires étrangères et du Mossad».
Si la rencontre des deux ministres a été parrainée par l’Italie, la Turquie semble en être la principale instigatrice, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, qui vient d’être réélu grâce au soutien de l’Occident auquel il a promis de faire des concessions, notamment en «éloignant l’armée du pouvoir», entretenant des relations à tout le moins ambiguës avec l’entité sioniste qu’il dit combattre en Palestine mais à l’égard de laquelle il fait preuve d’une criante indolence, malgré les graves exactions que le régime raciste de Tel-Aviv commet dans les territoires occupés et dans la ville sainte d’Al-Qods.
Jusqu’où ira le gouvernement Dbeibah, à la solde d’Erdogan, dans cette opération de rapprochement, dans un contexte marqué par la poursuite des divisions en Libye et l’impossibilité, à moyen terme, d’aboutir à une solution politique à la guerre civile qui fait rage dans le pays depuis l’assassinat de Kadhafi par le couple Sarkozy-Cameron au début de la décennie écoulée ? Comment réagira l’est du pays, tenu d’une main de fer par Khalifa Haftar, farouchement opposé au gouvernement de Tripoli qu’il tente, en vain, de reconquérir par les armes ? Soutenu par l’Egypte et les Emirats arabes unis – deux pays qui, eux aussi, entretiennent des relations avec Israël – l’homme fort de Benghazi sera-t-il également entraîné dans la voie de la normalisation ? L’est-il déjà ?
«La Libye était toujours, depuis la révolution de Kadhafi, dans le camp opposé à Israël, avec l’Algérie et la Syrie, des pays qui ont même combattu Israël aux côtés de l’armée égyptienne», a réagi un ancien ambassadeur israélien, en confessant qu’Israël «favorise Haftar en tant que dirigeant de la Libye, parce qu’il a la capacité d’unifier le pays». «C’est un secret de Polichinelle», a-t-il ajouté, en émettant le souhait de voir la Libye «réunifiée de nouveau sous un régime qui soit démocratique, libéral, ouvert et grâce auquel il pourra revenir dans la famille des nations». Traduire dans le camp des normalisateurs.
K. M.
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