Désignation de Lamamra par Guterres : pourquoi le Soudan et pas la Libye ?
Par Abdelkader S. – Le choix de l’ancien ministre des Affaires étrangères pour représenter le secrétaire général des Nations unies au Soudan n’a rien de surprenant. Sa désignation était dans l’air depuis plusieurs semaines. L’information donnée ce vendredi par Antonio Guterres n’est donc qu’une confirmation. Le nom de Ramtane Lamamra était inscrit sur les tablettes d’Antonio Guterres depuis avril 2020. A l’époque, l’ex-vice-Premier ministre sous le règne finissant du défunt Abdelaziz Bouteflika avait dû quitter son poste éphémère sur fond d’une crise politique profonde en Algérie, induite par le rejet d’un cinquième mandat pour le président sortant, alors impotent et absent.
Mais, en jetant son dévolu sur le diplomate algérien, le patron de l’ONU ne savait pas que sa décision allait rencontrer une résistance farouche qui allait faire capoter ses plans. En effet, Algeriepatriotique avait révélé les manœuvres de trois pays arabes pour barrer la route à Ramtane Lamamra, qui devait remplacer Ghassan Salamé en Libye. Une information confirmée, en son temps, par le porte-parole de la présidence de la République, qui n’avait cependant pas cité les noms des «frères» arabes qui s’étaient ligués contre la décision du Guterres, à savoir les Emirats arabes unis, l’Egypte et le Maroc.
Le journal Le Monde était revenu sur cette affaire. Dans un article intitulé «L’Algérie subit un revers diplomatique sur le dossier libyen» et reprenant l’information révélée par notre site quelques heures plus tôt, le quotidien français confirmait l’alliance anti-algérienne conduite par les Emirats arabes unis et ajoutait que Washington avait opposé son veto à la candidature de l’ancien chef de la diplomatie algérienne.
«Ramtane Lamamra, diplomate de haut vol à Alger, pressenti pour prendre la tête de la médiation des Nations unies en Libye, poste difficile mais prestigieux, a vu sa candidature torpillée par une coalition d’acteurs régionaux qui ont su trouver une oreille favorable auprès de l’administration de Donald Trump à Washington», écrivait Le Monde. Le quotidien français rappelait, toujours en se référant à notre article, que «les Emirats arabes unis, l’Egypte ainsi que le Maroc sont cités parmi les analystes du dossier libyen comme étant les probables sources d’obstruction ayant barré la route au candidat de l’Algérie».
«Bien qu’aucune annonce n’ait été faite, les Américains ont bien opposé leur veto à cette nomination de M. Lamamra au poste de chef de la Mission des Nations unies pour la Libye (Manul)», confirmait Le Monde, qui se référait, de son côté, à une source diplomatique au siège de l’ONU à New York. «L’échec de la candidature de M. Lamamra est d’autant plus préoccupant qu’il entrave la réactivation de la médiation onusienne à un moment critique où les combats s’intensifient en Tripolitaine», commentait le journal, qui reconnaissait chez le diplomate algérien sa qualité de «fin connaisseur des arcanes des affaires internationales» et son profil «idoine pour prendre en charge la médiation onusienne sur la Libye».
Pourquoi la nomination de Ramtane Lamamra au Soudan n’a pas suscité une réaction aussi fébrile de la part de ces trois pays arabes appuyés par les Etats-Unis ? Quelle menace le diplomate algérien représentait-il en Libye pour ceux qui ont tout fait pour se mettre en travers de son chemin en 2020 ? Qu’est-ce qui a changé depuis ?
A. S.
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