Shlomo Sand : «C’est aux Palestiniens de décider si les juifs peuvent rester !»
Par Nabil D. – «Historiquement, l’islam s’est comporté avec les juifs mille fois mieux que le christianisme», a affirmé Shlomo Sand. «Mes parents étaient venus [en Palestine] et n’avaient pas vraiment peur des Arabes, mais on a créé un Etat qui est anachronique parce qu’Israël n’appartient pas aux Israéliens», a ajouté l’historien israélien. «La plupart des juifs entre 1945 et 1948 étaient des réfugiés en Europe que personne ne voulait accepter», a-t-il rappelé dans un entretien à la chaîne Oumma TV.
«Les juifs ne voulaient pas venir en Palestine. C’est un mythe. Je vous donne un exemple : de la fin du XIXe siècle jusqu’à 1925, 1 800 000 juifs ont émigré aux Etats-Unis contre 65 000 en Palestine. Les Américains ont décidé d’arrêter l’immigration des non protestants. A partir de là, beaucoup de juifs ont émigré en Palestine, parce qu’ils n’avaient pas le choix», a encore expliqué ce professeur à l’université de Tel-Aviv, en précisant qu’«à cette époque-là, il n’y avait pas l’idée que les musulmans étaient contre les juifs».
«Comment peut-on continuer comme ça ? Quel avenir avons-nous au Proche-Orient avec – comme Hannah Arendt a dit – comme Etat juif ? S’il y a une place – et j’espère qu’il y aura une place au Proche-Orient –, pour les gens de confession juive, à mon avis, ce sera obligatoirement avec les Palestiniens», a-t-il affirmé, en soulignant que «ce sera aux Palestiniens d’accepter que nous restions au Proche-Orient, cela ne dépend que d’eux».
«Le sionisme n’est pas le judaïsme contre lequel il constitue même une révolte radicale», avait soutenu Shlomo Sand, dans une lettre au président français Emmanuel Macron, en 2017. «Tout au long des siècles, les juifs pieux ont nourri une profonde ferveur envers leur terre sainte, plus particulièrement pour Jérusalem, mais ils s’en sont tenus au précepte talmudique qui leur intimait de ne pas y émigrer collectivement avant la venue du Messie», avait-il indiqué, en faisant remarquer que «la terre n’appartient pas aux juifs mais à Dieu».
Pour ce qui est des événements factuels, Shlomo Sand avait demandé s’il était concevable de se définir comme sioniste alors que les sionistes n’ont cessé, depuis 1967, de développer des politiques d’extermination des Palestiniens et d’accaparer des terres des Arabes. «Est-ce cela le sionisme d’aujourd’hui ? Non ! Répondront mes amis de la gauche sioniste qui ne cesse de se rétrécir, et ils diront qu’il faut mettre fin à la dynamique de la colonisation sioniste, qu’un petit Etat palestinien étroit doit être constitué à côté de l’Etat d’Israël, que l’objectif du sionisme était de fonder un Etat où les juifs exerceront la souveraineté sur eux-mêmes, et non pas de conquérir dans sa totalité l’antique patrie.» «Et le plus dangereux dans tout cela, à leurs yeux : l’annexion des territoires occupés constitue une menace pour Israël en tant qu’Etat juif», avait-il averti.
Shlomo Sand avait expliqué, en outre, qu’en étant démocrate et républicain, il ne pouvait, comme le font sans exception tous les sionistes, de droite comme de gauche, soutenir un Etat juif. «Je suis un citoyen désireux que l’Etat dans lequel il vit soit une République israélienne, et non pas un Etat communautaire juif». «Descendant de juifs qui ont tant souffert de discriminations, je ne veux pas vivre dans un Etat qui, par son autodéfinition, fait de moi un citoyen doté de privilèges», avait-il assuré.
N. D.
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