Rahabi : «Il y a une volonté de mettre l’armée algérienne sous une pression permanente»
Par Mohamed K. – «Les nouvelles autorités maliennes n’ont pas pris en compte le capital historique des relations qui lient l’Algérie et le Mali», a indiqué Abdelaziz Rahabi. «L’Algérie a déployé des efforts considérables pour assurer la sécurité au Nord-Mali et sauvegarder ses frontières et limiter l’impact du terrorisme car le problème du Mali a un lien direct avec le terrorisme international», a-t-il expliqué dans un entretien à El-Khabar.
«L’Accord d’Alger a le soutien de toutes les organisations internationales, c’est-à-dire l’ONU, l’Union africaine, la Ligue arabe et l’Union européenne, il a dès lors l’approbation de l’ensemble de la communauté internationale, aussi cet accord ne peut devenir du jour au lendemain une source de problèmes pour le Mali», a expliqué l’ancien diplomate. «Le problème, a-t-il développé, est principalement lié à la nature du nouveau régime dans ce pays qui est entré dans une opération visant à instaurer un nouvel ordre régional dans le Sahel».
Pour Rahabi, «la position du Mali est injustifiée et insensée, d’autant que l’Accord d’Alger est le résultat d’une demande insistante des autorités maliennes». «Le nouvel ordre que les puissances étrangères s’emploient à mettre en place dans la région va créer des tensions à nos frontières sud, les pays frontaliers n’ayant pas d’armées puissantes, l’Algérie se verra dans l’obligation de protéger ses frontières et celles de ses voisins, c’est-à-dire ce qu’on appelle les frontières de la sécurité nationale», a-t-il précisé.
«Nous vivons une guerre d’influence qui fait que nous ne pouvons dissocier ce qu’il se passe au Sahel de la guerre en Ukraine et des événements qui se déroulent en Palestine», a encore affirmé Abdelaziz Rahabi, selon lequel «les autorités maliennes ne disposent pas de moyens autonomes, ni politiques, ni diplomatiques, ni militaires, pour qu’elles puissent parler à l’Algérie sur un ton impudent». «Cette attitude arrogante, a-t-il dit, signifie qu’elles comptent sur des puissances non-régionales ou ont adhéré à une stratégie non-régionale».
«Le but derrière ce nouvel ordre régional est de réduire l’influence de l’Algérie, de mettre l’armée algérienne sous une pression permanente et de l’entraîner dans une guerre d’usure, tout en créant des problèmes économiques avec les conséquences que cela engendrera sur le plan social», prédit l’ancien ministre de la Communication, qui voit dans les éléments de langage des nouvelles autorités maliennes, une similitude avec ceux du représentant du Maroc à l’ONU. Ce dernier avait, pour rappel, proposé en 2021 la tenue d’un référendum pour l’autodétermination de la Kabylie.
«Dans les relations internationales d’aujourd’hui, il y a ce qu’on appelle la distribution des rôles selon les capacités de chaque pays. Israël met au point les stratégies avec les Etats-Unis, certains Etats comme les Emirats arabes unis financent ses stratégies et d’autres, à l’image du Maroc, se chargent de leur exécution», a souligné Abdelaziz Rahabi, qui regrette que l’Algérie n’ait «malheureusement pas d’influence médiatique au Sahel de sorte que sa position soit comprise et qu’elle gagne l’adhésion des peuples de la région». «Nous n’avons pas de banques, d’imams, de médecins et d’enseignants dans ces pays comme ce fut le cas dans les années 1980», a-t-il noté.
«Les stratégies visant à affaiblir l’Algérie ne sont un secret pour personne. La politique expansionniste du Maroc, par exemple, est claire et tout le discours officiel marocain n’a qu’un seul objectif, celui de ternir l’image de l’Algérie et donner l’impression qu’elle menace les intérêts de l’Occident et défend ceux de l’Iran, cela prépare le terrain à une attaque occidentale contre nous», a fait savoir Abdelaziz Rahabi. «Aussi devrons-nous suivre de très près tous les indicateurs car il n’existe pas d’actions spontanées», a-t-il mis en garde, en faisant constater que «les Emirats de Cheikh Zayed ne sont pas les Emirats d’aujourd’hui, dont les positions en Libye et au Sahel sont hostiles à nos intérêts».
«L’Algérie paye le prix de son indépendance dans ses prises de décisions diplomatiques et donne la fausse impression d’être isolée, mais elle ne dérogera pas à cette doctrine et cette identité héritées de la Guerre de libération nationale», a-t-il conclu.
M. K.
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