Extraits du voyage d’Antoine de Maximy en Algérie : ces clichés qui persistent
Par Karim B. – Antoine de Maximy a commencé à poster des extraits de son reportage réalisé en Algérie en septembre 2023. Des extraits qui tournent en boucle sur les réseaux sociaux et qui sont fortement commentés, les Algériens attendant avec impatience ce que le globe-trotteur, qui a fait le tour du monde, a découvert dans notre pays. Les extraits ont été tournés à Tizi-Ouzou et à Djanet, dans l’extrême-sud de l’Algérie.
Dans un village de Kabylie, la visite du journaliste français a coïncidé avec la célébration d’une fête religieuse. L’ambiance était festive et le reporter avait du mal à se frayer un chemin au milieu de la foule concentrée à l’entrée d’un mausolée qu’il finira par filmer de l’intérieur, tout en discutant avec des habitants locaux. Antoine de Maximy était quelque peu surpris par la présence nombreuse de femmes. Dans un de ses échanges avec un homme, ce dernier, sans doute perturbé par la présence des caméras, s’est lancé dans des explications farfelues au sujet de la femme kabyle, alléguant que celle-ci trouverait dans ces cérémonies la possibilité de sortir de chez elle. «Comme si les femmes kabyles étaient emprisonnées par leur mari ou leur père pendant les autres jours de l’année», ont rétorqué des concitoyens irrités par cette contrevérité.
Cette explication, aussi fausse que saugrenue, s’est ajoutée à des commentaires de youtubeurs qui réagissaient à l’intervention d’une vieille dame – qui expliquait à l’hôte français qu’elle ne parlait pas la langue de Molière –, en affirmant que les Algériens ne maîtrisaient pas le français et que le journaliste avait dû avoir tout le mal du monde à comprendre et se faire comprendre durant son séjour en Algérie. Ce à quoi des internautes ont répondu, avec humour, que non seulement les Algériens parlaient le français [parfois] mieux que leur propre langue, mais que De Maximy s’est rendu dans des pays lointains où il s’est exprimé aussi éloquemment en gestes qu’en paroles.
Mais c’est le crochet d’Antoine de Maximy à Djanet qui fait le plus jaser. Dans l’enregistrement, on voit ce dernier se faire interpeller par un habitant de la ville, d’un certain âge, lui demandant, en adoptant un ton martial, s’il avait sollicité l’autorisation d’un jeune homme qu’il avait filmé auparavant. Ce à quoi le journaliste a rétorqué qu’il avait parfaitement raison et qu’il allait effectivement en faire la demande après coup. Se faisant, comme à son habitude, inviter par un habitant pour passer la nuit chez lui, la réponse de celui-ci fut d’abord positive, avant que ce dernier ne change d’avis à la vue de ce qui semble être un policier en civil qui signifiait gentiment au journaliste de le suivre car, lui a-t-il expliqué, il était attendu à l’administration pour remplir les formalités d’usage.
Ce passage, s’il est sorti de son contexte, pourrait laisser supposer que l’Algérie serait une sorte de goulag, où les citoyens seraient constamment fliqués et ne seraient pas libres de leurs mouvements. Or, les diplomates et les étrangers qui ont eu l’occasion de visiter l’Algérie savent qu’ils sont soumis à des règles strictes lors de leurs déplacements à l’intérieur du pays, pour des raisons évidentes de sécurité héritées de la décennie noire. Les assassinats de ressortissants étrangers par les hordes sauvages du GIA avaient contraint les autorités politiques et sécuritaires, dans les années 1990, à prendre des mesures pour éviter que des actes terroristes ciblés soient commis. Le réflexe est demeuré intact en dépit de la nette amélioration de la situation sécuritaire depuis de longues années.
Cet «incident» de Djanet dévoile, en tout cas, la méfiance des Algériens à l’égard des médias et des journalistes français, connus pour leur propension à déformer la réalité quand il s’agit de décrire l’Algérie et son peuple. Le travail d’Antoine de Maximy ne semble pas avoir aidé à casser les stéréotypes. A moins que le reste du reportage soit moins hiératique. Nous le saurons ce 8 mars.
K. B.
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