Sans-papiers algériens en France : quand Hafiz fait dans la récupération
Par Nabil D. – Le recteur de la Grande Mosquée de Paris court par monts et par vaux. Il est partout, il se mêle de tout, sauf de ce qui concerne l’institution religieuse qu’il est censé diriger. Empiétant sur les prérogatives de l’ambassade d’Algérie en France, Chems-Eddine Hafiz s’est désormais érigé en interlocuteur direct du chef de l’Etat, pour peu qu’il ait été invité, de façon tout à fait protocolaire, à deux ou trois événements nationaux organisés ou parrainés par la présidence de la République. Mais cette agitation commence à devenir dangereuse à partir du moment où il est passé de l’activisme associatif ordinaire à l’immixtion dans un dossier ultrasensible, celui de nos ressortissants en situation irrégulière.
Chems-Eddine Hafiz promet aux sans-papiers algériens le règlement de leur problème en se faisant le porte-parole du président de la République, au nom duquel il annonce une mesure «historique». «J’ai discuté de votre situation avec le président Tebboune, qui s’engage à protéger tous les Algériens à travers le monde, qu’ils aient un séjour régulier ou non», a-t-il avancé, en ajoutant que ce dernier aurait demandé à connaître le nombre de personnes concernées. Car, a-t-il assuré, «il veut connaître le nombre exact pour prendre une décision politique importante qui faciliterait l’obtention de tout document, y compris un passeport, auprès des consulats d’Algérie».
Des sources proches du dossier, sollicitées par Algeriepatriotique, n’ont pas caché leur étonnement face à ces ingérences du recteur d’une mosquée dans les affaires consulaires, relevant du ministère des Affaires étrangères. Ces sources imputent ces dépassements à «l’apathie de l’ambassadeur d’Algérie à Paris» qui «laisse cet opportuniste s’étendre sur ses attributions et se substituer à la représentation diplomatique algérienne, dont il accapare le rôle sans que personne l’en ait chargé». «Les consuls algériens n’ont pas attendu que le recteur de la Grande Mosquée de Paris prenne langue avec les plus hautes autorités du pays pour se pencher sur ce dossier sensible et délicat», précisent nos sources.
«Des rapports sont constamment envoyés à Alger, et tout nouveau consul qui prend ses fonctions trouve le dossier sur le bureau de son prédécesseur, c’est dire l’importance qu’accorde le ministère des Affaires étrangères à cette question qui touche un grand nombre de nos concitoyens», indiquent ces sources. Lesquelles sources voient dans les «gesticulations» de Chems-Eddine Hafiz un «brassage de vent» et une «vaine tentative de récupération motivée par son défaut de représentativité auprès des Algériens de France, qui le perçoivent moins comme un défenseur de leurs droits qu’une annexe du ministère de l’Intérieur français et du CRIF».
«Le président de la République est au courant de ce dossier à travers le gouvernement, représenté par le ministère des Affaires étrangères, et la Direction générale de la documentation et de la sécurité extérieure qui travaille en parfaite coordination avec nos ambassades et nos consulats à travers le monde», relèvent nos sources, selon lesquelles «les plus hautes autorités du pays accordent à ce problème une importance particulière et cherchent des solutions à la mesure de sa complexité». «Le recteur de la Mosquée de Paris cherche à tirer la couverture à lui, sans se soucier, le moins du monde, du sort de nos compatriotes qui se trouvent ainsi pris dans son jeu machiavélique qui a pour seule finalité de reprendre à son profit le travail des missions consulaires», pointent nos sources.
N. D.
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