Avant la prison, passez par la case défaite, Mister Benyamin Netanyahou !
Une contribution d’Ali Akika – Pour cacher sa défaite, l’armée israélienne innove dans sa guerre d’information. Elle n’a pas encore compris qu’un mensonge, une fois découvert, est plus dévastateur qu’une amère vérité. De quel mensonge s’agit-il ? De cette annonce inattendue d’un retrait des troupes d’Israël de Khan Younès. Dans l’art de la guerre, un retrait des troupes ne s’annonce pas à l’aide des trempettes de Jéricho. Toujours dans l’art de la guerre, un retrait des troupes est une opération délicate qui se fait dans la discrétion et sous la surveillance de bataillons annexes aguerris, frais et dispos.
Pour compléter le tableau, signalons que Khan Younès a été «nettoyée» de ses bataillons de «terroristes» et ne restait que leur chef, Yahia Sinwar, dont on annonçait chaque jour que l’invincible armée est à un pas de lui faire la peau. Remarquons l’expression vulgaire «à un pas de lui faire sa peau» reprise par Netanyahou qui annonça, dimanche 7 avril, à la fois le retrait de son armée, laquelle était «à un pas de la victoire». Je reviendrai sur la défaite de l’information d’Israël construite par des esprits délirants, confortés par le soutien de l’armée des journaleux en Occident dont le cerveau fonctionne comme dans les films Western sous le signe du «bon et du méchant».
Revenons à ce dimanche 7 avril que les adeptes de la vision binaire «du bon et du méchant» y voyait une victoire «habituelle» d’Israël. Sauf que cette fois, Israël avait en face de lui un peuple soutenant ses combattants et non des Etats féodaux dont certains dépendaient pour leur nourriture du blé de l’Oncle Sam. Ce qui s’est passé le samedi 6 avril, la veille du retrait de l’armée israélienne sous le feu de la résistance palestinienne, c’est une embuscade tendue par les Palestiniens. Le bilan fut lourd : 14 soldats israéliens morts et des dizaines de blessés, des Merkava détruits, ces chars qui font la fierté d’Israël. Les lecteurs d’Algeriepatriotique peuvent se rapporter aux journaux israéliens qui ont comptabilisé des pertes entre 4 et 8 morts. Je laisserai de côté les réelles pressions politiques des Américains et celles des familles des captifs israéliens aux mains de la résistance car elles n’ont pas de liens directs avec la bataille du retrait militaire israéliens sous le feu de la résistance.
Les raisons du retrait annoncé le 7 avril sont à rechercher dans l’art de la guerre qui embrasse les capacités des armées et de l’intelligence stratégique de la conduite de la guerre. L’armée d’occupation, en dépit de ses capacités militaires et de la débauche de son matériel, se bat en territoire ennemi au milieu de combattants «invisibles» et d’un peuple foncièrement hostile. Une armée à laquelle la résistance a réservé une surprise dont elle a fait allusion il y a quelques années et interprétée par l’ennemi comme un bluff classique. Cette surprise, c’est l’incroyable construction d’une Gaza souterraine. Celle-ci devint un champ de bataille piégé où l’armée d’occupation avait un ennemi qui surgissait de nulle part et se repliait tranquillement dans ses bases. La double singularité du champ de bataille et de la formation des combattants à un type de guerre complexe est déjà enseignée dans les écoles de guerre.
Berné par ses propres capacités militaires en avions, chars et des centaines de milliers de soldats, Israël comptait faire une petite promenade de quelques jours puis rentrer chez «lui», la fleur au fusil. C’est ce qu’il fit en entrant dans la ville de Gaza «contrôlée» après 2/3 jours de bataille. L’ennemi s’enfonça ensuite dans le centre de Gaza et poursuivit sa route à Khan Younès. Pendant cette progression, gonflée par ses «succès», il découvrit en même temps que le monde que la résistance frappait à Gaza ville, dans le centre et à Khan Younès. Attiré dans tout Gaza, le piège de la résistance fonctionna. Et dans cette ville, l’armée d’occupation connut, il y a quelques mois, ses plus grandes pertes en une seule journée : 21 morts et des dizaines de blessés qui campaient dans des immeubles en ruines que la résistance mina préalablement, car ils servaient de lieu de campement à l’ennemi.
Le campement est un facteur non négligeable dans une guerre. Mettre les troupes à l’abri des attaques, se reposer et se mouvoir pour attaquer l’ennemi nécessitent une logistique, atout tactique indispensable. Le bilan, strictement militaire en termes de morts, de blessés, de traumatisme des soldats, a abîmé l’outil de défense de cet Etat dont dépend sa survie. Les divergences et les prises de bec qui fuitent dans la presse reflètent l’inquiétude des cadres supérieurs de l’armée en fonction ou à la retraite. Sans minimiser les pressions politiques extérieures, une fêlure dans l’appareil militaire constitue un danger pour une armée qui voit à l’horizon s’accumuler des nuages noirs.
L’humiliation qu’elle subit face au Hezbollah à la frontière Liban-Palestine a démontré que l’invincible armée est incapable de protéger quelque 100 000 habitants qui ont fui leurs maisons. C’est en définitive le sauvetage de l’outil de défense de l’Etat qui importe aux généraux qui ont fait pression sur Netanyahou. Le pays est isolé, les amis ne veulent pas le suivre aveuglement ayant leurs propres intérêts à préserver dans un monde qui s’attend à des bouleversements gigantesques.
Revenons à cette armée qui a connu dans le passé une première défaite sans en payer directement le prix. Ce fut en octobre 1973 où ses services de renseignement n’avaient rien vu venir du canal de Suez où l’armée égyptienne fabriqua une petite flottille pour prendre d’assaut la fameuse ligne Bar Lev. Ce fut Golda Meir, la Première ministre, qui paya la note de l’incompétence d’une armée «invincible». Le désastre du 7 octobre, où les services de renseignement ont offert au monde leur défaillance, ne va pas être effacé en désignant un seul coupable. Après la défaite des services de renseignement le 7 octobre, voilà que le 7 avril, six mois plus tard, c’est l’armée du fantassin jusqu’au ministre/général de la guerre qui se sentent mal à l’aise par le retrait de Khan Younès, ville doublement symbole. C’est la ville natale de Yahya Sinwar, chef du Hamas, et supposée siège de la direction de la résistance.
L’annonce du retrait d’une division israélienne se répandit comme une traînée de poudre. Le feu dévastateur de la défaite se répandit, il fallait vite sauver le soldat Netanyahou. La servile presse se focalisa sur les pressions de Biden, le préférant à la bravoure des combattants à l’origine de la défaite de l’armée «morale». Une presse déjà malmenée et moquée par les Russes, évidemment affamés, qui se battaient comme à l’âge de la pierre, avec des pelles mais occupent néanmoins 20% de l’Ukraine. Eh bien, ces Russes sont déclarés perdants par la noble et riche presse occidentale. En Ukraine comme en Palestine, l’Occident, avec ses âmes noires qui y font la loi, ne peut pas perdre, voilà la foi du charbonnier qui fait croire tant de balivernes qui font mal à ceux qui ne sont pas armés pour l’hypocrisie d’une telle presse.
Cette guerre en Palestine a révélé des faits enfouis mais connus par ceux qui s’abreuvent aux bonnes sources de l’info. D’abord, des pays arabes qui pensent construire un avenir en s’alliant avec un Occident au lieu de se débarrasser de leurs structures archaïques qui ont facilité l’ouverture des portes à la colonisation. Ensuite, à cet Occident qui ne se conçoit qu’en maître du monde pour jouir de la plénitude des beautés du monde. Quant à la notion du maître et de l’esclave qui régit la relation Etats-Unis/Israël, elle marche sur la tête. Le monde d’aujourd’hui qui va de l’avant marche sur ses pieds. Et dire que ce sont les Palestiniens, enfermés et emmurés chez eux par le duo complice américano-israélien, qui leur apprennent de ne plus marcher sur la tête.
Reste la menace qui pèse sur Rafah. Avec des gens acculés comme l’est Netanyahou, on peut s’attendre à tout. Avec la rage qui l’habite et l’humiliation qui l’attend pour être remercié et invité à faire connaissance avec la prison, le pire n’est pas à exclure. Mais comme la vérité est plus belle que le mensonge et que la laideur des âmes insupporte l’humanité, parions sur la vérité et la beauté.
A. A.
P.-S. : Chères lectrices, chers lecteurs, Aïdkoum mabrouk
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