Quand le journal français L’Opinion étrille Tebboune après l’avoir encensé
Par Abdelkader S. – Il est loin le temps où le journal français L’Opinion devait une fière chandelle au président Abdelmadjid Tebboune pour avoir, par deux fois, accepté de s’exprimer dans ses colonnes. L’entretien avait, on s’en souvient, été largement relayé à l’époque par les médias officiels et officieux en Algérie. «L’Opinion organisait mardi soir, avec l’agence de communication 35 degrés Nord, la web conférence Gouvernances, afri-capitalisme et soft power : la nouvelle donne africaine. Dans ce cadre, le président algérien Abdelmadjid Tebboune nous a accordé une interview exclusive, en duplex depuis Alger», écrivait ce quotidien en octobre 2021.
Le même journal soulignait, tout aussi élogieux, en préambule à une première interview publiée en juillet 2020 : «Il [Tebboune] promeut d’importantes réformes politiques et économiques au moment où la crise sanitaire et la baisse des cours des matières premières ont réduit les réserves de change du pays.»
Quatre ans plus tard, L’Opinion fait un virage à 180 degrés, au lendemain de l’élection présidentielle qui vient de maintenir le candidat à sa propre succession à son poste pour un second mandat. «Ces élections sont une triste farce dont les électeurs algériens, dans leur grande majorité, ne sont pas dupes. Réélu avec un score pharaonique, le président Tebboune ne sort pourtant pas renforcé de cette élection, tant les chiffres proclamés sont éloignés de la réalité. Reste à comprendre, dans l’opacité du régime, qui avait ainsi intérêt à l’affaiblir», lit-on dans ce journal qui semble avoir monnayé cette virevolte.
«La réélection d’Abdelmadjid Tebboune, 80 ans en novembre, intervient dans un moment complexe pour l’Algérie au niveau international. Fin 2023, elle s’est vu refuser l’entrée dans le club des Brics – l’équivalent du G7 pour les non-Occidentaux –, même si elle vient de se voir accorder un strapontin à la banque des Brics», poursuit L’Opinion, dont la virulence du propos tranche avec le ton dithyrambique qu’il avait réservé au président Tebboune dans un passé pas assez éloigné pour le faire oublier.
Un changement radical inexplicable ? Sûrement pas. Le brûlot est clairement, une fois de plus, commandité par le Makhzen. Le journal français s’est démasqué tout seul à travers la chute de l’article qui aurait pu se limiter à critiquer l’élection présidentielle algérienne sans commettre la bavure d’évoquer le Maroc. Un parallèle hors sujet qui n’a absolument pas sa place dans l’article, si ce dernier n’avait pas été inspiré par le régime de Rabat. «Les tensions s’accumulent avec le Mali voisin, alors que le Maroc, son grand rival, enregistre de nombreux succès, notamment sur la question du Sahara Occidental», conclut, en effet, le journal français qui attente à sa propre crédibilité en passant ainsi d’un extrême à un autre.
A. S.
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