Réglementation de l’esport en Europe : ce qu’il faut savoir
Pendant longtemps, l’esport est resté un phénomène de niche. Seuls les plus gros fanatiques de Unreal Tournament ou des LAN sur StarCraft avaient une vague idée de ce que c’était ou de ce que ça pouvait devenir. Mais, dès son entrée dans la sphère populaire, l’esport a conquis les masses comme une traînée de poudre. Aujourd’hui, l’industrie est sortie de la coquille réglementaire qui gouverne l’industrie traditionnelle du jeu-vidéo. Nous en sommes à un stade où l’industrie dérégulée représente un véritable « No Man’s Land » où tout (ou presque) est permis.
L’Europe, élève modèle de la réglementation de l’esport
Comme dans de nombreuses industries innovantes, l’Europe joue souvent le rôle de leader en termes de réglementation. L’esport ne fait pas exception à cette règle. Alors que la plupart des autres régions du monde adoptent une approche relativement laxiste ou laissent les éditeurs conserver une influence monumentale sur l’esport, le Parlement Européen procède autrement.
En effet, le 10 novembre 2022, le Parlement Européen a publié une résolution portant sur l’esport et les jeux-vidéo. Cette résolution touche à divers aspects de l’industrie vidéoludique sur le continent. Mais dans le domaine de l’esport, elle émet certaines des premières pistes de réglementation utile.
La réglementation des événements
Parmi les nombreuses recommandations du Parlement Européen, il est prévu de protéger les événements des malversations et du trucage des matchs. Loin d’être une démarche précoce, c’est une preuve du potentiel que les autorités législatives voient dans l’esport. Rappelons qu’en plus du Parlement Européen, de nombreux pays ont également entamé une réglementation des événements. En France notamment, la réglementation touche entre autres au statut juridique des instances organisatrices, au montant des cash prize, à l’âge des participants, et bien plus encore.
Le Parlement Européen souligne également le caractère transfrontalier de la discipline et recommande l’harmonisation des normes et des pratiques sur l’ensemble du continent. Ceci rappellera à plus d’un, la liberté cross-plateforme et le droit de propriété absolu que les joueurs réclament déjà auprès des éditeurs. Quelque chose qui permettrait aux uns de mettre un compte Fortnite à vendre ou de participer à un tournoi à l’autre bout du continent sans handicap majeur.
La réglementation des équipes
Réglementer l’esport nécessite aussi de réglementer le fonctionnement des équipes. En effet, la popularité grandissante de l’esport en fait un véhicule d’investissement très attractif. Des lois sont nécessaires pour assurer la transparence des mouvements de capitaux, d’une part ; et pour protéger les joueurs, souvent très jeunes, d’autre part.
La réglementation des équipes met également en place les conditions dans lesquelles elles peuvent recruter, échanger ou mettre à disposition leurs joueurs. Un canevas réglementaire qui rappelle le fonctionnement des clubs sportifs traditionnels.
Le jeu responsable
Sans surprise, l’un des aspects du jeu-vidéo qui fait le plus l’objet de réglementation, c’est son aspect addictif. Dans l’esport notamment, toutes les pratiques contraires au jeu responsable sont restreintes ou interdites selon les territoires. Et ce, qu’il s’agisse des jeux occasionnels ou compétitifs susceptibles d’encourager l’addiction des joueurs. Ou même des paris portant sur les jeux esport. Dans un cas comme dans l’autre, l’étau réglementaire s’est bel est bien resserré en Europe.
Quels vides réglementaires faut-il encore combler ?
Malgré toutes les recommandations du Parlement Européen et les législations nationales, l’esport en Europe est encore loin d’être entièrement réglementé. Par exemple, un club peut-il envisager de mettre un compte Fortnite à vendre pour générer du revenu ? Une équipe peut-elle recruter des joueurs hors d’Europe en pleine ligue ? La plupart de ces considérations dépendent des règles des éditeurs, mais la réglementation nationale ou européenne doit apporter plus d’équité dans cette industrie débridée.
Parmi les domaines encore dérégulés, on peut citer :
- Le régime fiscal des organisateurs d’événements et des athlètes esport ;
- La reconnaissance de l’activité au niveau national ;
- La standardisation des formats de compétition ; etc.
Conclusion
L’esport a de très beaux jours devant lui, personne ne semble en douter. Mais, il faut admettre que le développement de cette industrie risque d’être entravé dans un environnement dérégulé. S’il est vrai que la législation peut rassurer les investisseurs et créer un environnement propice pour le développement pérenne de l’activité, ce n’est pas sans risque. En effet, pour l’esport dont les limites n’ont pas encore été parfaitement cernées, il ne faut pas qu’une régulation trop précoce ou trop rigoureuse devienne une barrière insurmontable dans le futur.
C. P.