Dominique de Villepin : «Brandir l’Accord de 1968 est vouloir ouvrir une guerre avec l’Algérie»
Kahina Bencheikh El Hocine – L’ancien Premier ministre français Dominique de Villepin a déploré la tentation en France de faire de l’Algérie un bouc émissaire d’un certain nombre de problèmes propres à la France, notamment l’immigration.
Interrogé sur le plateau de Franceinfo sur les dernières déclarations du président Abdelmadjid Tebboune à propos d’une éventuelle visite officielle en France ou encore les Accords de 1968 et comment la France doit réagir aux propos du président algérien, Dominique de Villepin a regretté la dégradation des relations entre les deux pays. «Cela fait malheureusement de longs mois, pour ne pas dire des années, que l’on voit la relation avec ce grand pays ami et frère qu’est l’Algérie se dégrader jour après jour», en notant que «de dégradation en dégradation, on en vient à des accusations qui, évidemment, dépassent, et de loin, toute réalité».
Pour lui, en regardant en arrière, «le travail» fait par de nombreux historiens des crimes de guerre, voire même des crimes contre l’humanité est une chose, invitant les journalistes à revenir à la mesure. Pourquoi ? «Parce que la tentation aujourd’hui, ici en France, c’est de faire de l’Algérie un bouc émissaire d’un certain nombre de nos problèmes», en indiquant que «c’est particulièrement vrai en matière d’immigration».
«L’Algérie n’a pas à porter cela et nous avons à trouver avec les Algériens des réponses et des solutions», a affirmé de Villepin, en assurant que «vouloir brandir aujourd’hui le symbole de l’Accord de 68 dont nous savons tous qu’il est une des conséquences des Accords d’Evian, c’est vouloir ouvrir une guerre avec l’Algérie. Une guerre des mémoires. Cela est absurde et il y a d’autres chemins».
«Aujourd’hui, nous ne réglerons la question de l’immigration des Algériens, détenus en centres de rétention administrative et que nous voulons envoyer chez eux qu’en accord avec l’Algérie», a-t-il indiqué tout en ajoutant que «ça implique le dialogue, ça implique le respect et ça implique la capacité d’assumer cette histoire que nous avons, qui est partagée et qui est si importante des deux côtés de la Méditerranée».
Abordant le sujet qui fâche les autorités algériennes, celui du soutien de Pari au plan d’autonomie marocain pour le Sahara Occidental, l’ancien Premier ministre français a estimé que la France ne peut avancer dans un règlement diplomatique sans le faire avec tous. «Le président de la République a voulu renouer avec le Maroc, en acquiesçant sur la souveraineté marocaine du Sahara Occidental. Nous aurions dû faire tout cela dans le cadre des Nations unies et en liaison avec l’Algérie», a-t-il jugé en concluant : «On ne peut pas, aujourd’hui, faire avancer un règlement diplomatique de quelque question que ce soit sans le faire avec tous.»
Pour rappel, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, avait, dans un entretien périodique diffusé à la Télévision publique, annoncé qu’il n’irait pas à Canossa et que l’accord signé entre les deux pays en 1968 est une coquille vide utilisé comme étendard par les extrémistes français.
K. B.-H.
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