Yassine Belattar versus Kamel Daoud ou l’incarnation de l’hypocrisie française

Belattar Rabat
Yassine Belattar lynché pour avoir dénoncé Charlie Hebdo. D. R.

Par Abdelkader S. – Les médias français se sont focalisés principalement, et avec acharnement, sur un membre de la délégation qui a accompagné Emmanuel Macron dans son déplacement au Maroc. C’est à un lynchage en règle qu’un certain Yassine Belattar est soumis depuis l’annonce de sa présence parmi les quelque 130 personnalités qui ont fait le voyage avec le président français à Rabat. L’animateur radio d’origine marocaine est accusé de mille et une tares : «Il voit l’islamophobie partout», «un repris de justice qui vient donner des leçons», «un thuriféraire de l’islamisme», «un bouffon gênant président Macron», «sinistre personnage».

Que reproche-t-on à cet ancien membre de l’instance du Conseil présidentiel des villes qui en a démissionné en 2019 ? Sa condamnation, en septembre 2023, à quatre mois d’emprisonnement avec sursis pour «menaces de mort et de crimes» à l’encontre de personnalités du monde du spectacle. En réalité, Yassine Belattar dérange pour avoir osé critiquer la ligne éditoriale islamophobe de Charlie Hebdo et d’avoir accusé les médias français d’être phagocytés par l’extrême-droite qui, dit-il, «a un poids consternant» en leur sein.

En face, un Algérien récemment naturalisé français jouit d’une couverture médiatique dithyrambique depuis que la fabrique d’écrivains a porté aux nues un certain Kamel Daoud, à propos duquel Jacques-Marie Bourget a publié une récente tribune dans Mediapart, intitulée ironiquement : «Si tu veux être sélectionné pour le prix Goncourt, cogne ton ex-femme !» Le journaliste français rebelle écrit : «En 2019, Kamel Daoud a été condamné par la justice d’Oran pour avoir frappé son ex-épouse. Pas un mot dans les journaux français de qualité.» Ce qui vaut pour l’un [Yassine Belattar] ne vaut pas pour l’autre [Kamel Daoud], donc. Le premier combat l’islamophobie, le second combat l’islam.

«Il faut dire que Kamel Daoud, le corps du délit, est un ami de Bernard-Henri Lévy et de Macron, sorte de conseiller Maghreb de l’ombre. Ainsi, notre néo-Albert Camus a été condamné à Oran pour avoir frappé son ex-femme. Il se serait alors conduit comme ces Arabes qu’il dénonce ? Incroyable ! Le prix Goncourt qu’il s’apprête à recevoir va effacer tous ces petits avatars», s’indigne Jacques-Maris Bourget.

En France, pour obtenir le quitus des médias et y être admis comme une personnalité fréquentable, il faut crier à l’antisémitisme à tout bout de champ et considérer l’islamophobie comme une vue de l’esprit et ceux qui la dénoncent comme des partisans des «terroristes du Hamas» à condamner au bannissement.

A. S.

Commentaires

    Mohamed El Maadi
    1 novembre 2024 - 5 h 53 min

    Kamel Daoud, autrefois porte-voix des opprimés, s’est métamorphosé en un pitoyable pantin des forces qu’il prétendait jadis combattre. Son parcours est l’incarnation même de la trahison intellectuelle, un spectacle navrant de compromission morale qui laisse un goût amer à ceux qui avaient placé leurs espoirs en lui.

    Il fut un temps où Daoud brandissait sa plume comme une arme, dénonçant avec véhémence les atrocités coloniales qui avaient meurtri son peuple. Ses mots résonnaient alors comme un cri de justice, portant la voix de ceux qui avaient trop longtemps été réduits au silence. Mais hélas, la gloire éphémère et les sirènes de la reconnaissance occidentale ont eu raison de ses convictions.

    Aujourd’hui, Daoud s’est mué en un vulgaire caméléon idéologique, changeant de couleur au gré des vents favorables à sa carrière. Il a troqué son intégrité contre quelques miettes de notoriété, se vautrant dans une posture qui flatte honteusement les nostalgiques d’un passé colonial sanglant. Son revirement est d’autant plus répugnant qu’il semble désormais s’acoquiner avec l’héritage moral des « Commandos Georges », ces milices de sinistre mémoire dont les méthodes barbares rivalisaient avec celles de la Gestapo.

    Ce reniement spectaculaire de ses origines et de son histoire est non seulement une insulte à la mémoire de ceux qui ont souffert, mais aussi une trahison envers les générations futures qui cherchent des modèles d’intégrité intellectuelle. Daoud a vendu son âme pour un bref instant sous les projecteurs, oubliant que la lumière la plus vive projette aussi les ombres les plus sombres.

    Qu’il ne s’y trompe pas : cette danse macabre avec les démons du passé ne lui garantira aucune pérennité. Les systèmes qui aujourd’hui l’encensent pour sa complaisance le sacrifieront demain sur l’autel de leurs propres intérêts. Daoud n’est qu’un pion jetable dans un jeu dont il ne maîtrise pas les règles, un utile idiot dont la parole sera étouffée dès qu’elle ne servira plus les desseins de ses nouveaux maîtres.

    En reniant ses racines et en crachant sur les souffrances de son peuple, Kamel Daoud s’est condamné à n’être qu’une note de bas de page dans l’histoire de la littérature algérienne. Son nom, autrefois promesse d’une voix authentique et courageuse, ne résonnera plus que comme un avertissement : voici ce qui arrive quand on vend son intégrité au plus offrant.

    La vraie tragédie de Daoud n’est pas seulement sa chute morale, mais le gâchis d’un talent qui aurait pu être une force de changement positif. Au lieu de cela, il restera comme l’exemple parfait de la corruption intellectuelle, un phare inversé qui montre aux générations futures non pas la voie à suivre, mais celle à éviter à tout prix.

    Que Kamel Daoud profite donc de ses derniers instants de gloire factice. Car l’histoire, elle, ne pardonne pas aux traîtres, et son jugement sera sans appel. Quand le rideau tombera sur cette farce pathétique, il ne restera de lui qu’un nom synonyme de duplicité, un avertissement pour tous ceux qui seraient tentés de troquer leur conscience contre une reconnaissance éphémère.

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