Et les Yéménites ?

Yémen
Le peuple du Yémen abandonné à son triste sort. D. R.

Par Khider Mesloub – Depuis quelque temps, Benjamin Stora, historien français spécialiste de la Guerre d’Algérie et de la colonisation française, désormais réduit à sa judéité, est la cible de critiques virulentes pour son supposé ou avéré silence dans la guerre génocidaire menée par l’Etat nazi d’Israël. D’aucuns, notamment des intellectuels algériens, l’accusent de faire preuve d’hypocrisie, voire de complicité.

«Lorsqu’il s’agit de Gaza, lorsqu’un autre peuple subit la destruction, l’humiliation et l’oppression, son verbe se fige, sa plume s’assèche, son indignation s’évanouit. Il détourne lâchement le regard, feignant l’ignorance face aux massacres, aux démolitions, aux bombardements qui écrasent, sous le fracas des bombes, des générations entières. Ce silence pesant n’a d’égal que l’infamie qu’il cautionne par son mutisme», écrit Khaled Boulaziz, à propos de Benjamin Stora.

A notre tour d’accuser la majorité des intellectuels arabes et musulmans d’imposture morale, d’humanisme à géométrie variable, d’indignation sélective.

Où étaient les intellectuels arabes et musulmans – exit Khaled Boulaziz qui, avec honneur, avait dénoncé le génocide des Yéménites –, quand la coalition génocidaire dirigée par l’Arabie Saoudite livrait, durant huit années consécutives, sans relâche, une guerre exterminatrice à la population yéménite ? Où étaient-ils ces millions d’hypocrites arabes et musulmans, quand leurs pays respectifs participaient – ou cautionnaient par leur silence complice – au génocide du peuple yéménite dans le cadre de la coalition militaire dirigée par la féodale monarchie saoudienne ?

Il est utile de rappeler qu’en huit ans, la guerre au Yémen aura été l’un des conflits armés les plus meurtriers du début du XXIe siècle. Plus de 380 000 Yéménites ont été massacrés, 4 millions déplacés, 80% de la population sont toujours dépendants de l’aide humanitaire, 17,3 millions de personnes sont impactées par le désastre humanitaire, dont 5 millions en situation proche de la famine, donc voués inéluctablement à mourir, par la faute de la guerre génocidaire menée par la coalition d’une dizaine de pays musulmans.

Aussi, aujourd’hui, les intellectuels arabes et musulmans, qui ont brillé par leur mutisme criminel durant huit ans devant le génocide commis contre les Yéménites par la coalition des pays musulmans, n’ont aucune crédibilité en défendant hypocritement le peuple palestinien martyr de Gaza.

Pourtant, les Yéménites sont musulmans. Or, l’ensemble des intellectuels arabes et musulmans avaient ignoré délibérément leur souffrance et leur martyre infligés par des Etats islamiques génocidaires.

Lorsque le peuple yéménite subit destructions et massacres, «le verbe des intellectuels arabes et musulmans se fige, leur plume s’assèche, leur indignation s’évanouit. Ils détournent lâchement le regard».

En revanche, depuis le 9 octobre 2023, ces mêmes intellectuels s’activent sans relâche pour dénoncer le massacre des Palestiniens de Gaza. Pourquoi cette indignation sélective, cet humanisme à géométrie variable ? Est-ce parce que les auteurs du génocide des Palestiniens sont juifs et, à cet effet, méritent une réprobation et une condamnation sans appel, du seul fait de leur judéité par essence fautive et punissable ?

K. M.

Comment (7)

    Mohamed El Maadi
    23 février 2025 - 15 h 04 min

    L’hypocrisie morale face aux tragédies humaines révèle une instrumentalisation cynique de la souffrance. Tandis que Gaza cristallise l’indignation mondiale, le silence assourdissant sur le martyre yéménite trahit une sélectivité révoltante dans notre compassion. Cette géométrie variable de l’empathie contredit l’essence même du précepte islamique fondamental : tout musulman est frère, indépendamment de son origine.

    La cause palestinienne, aussi juste soit-elle, est devenue pour certains un fonds de commerce lucratif, un instrument de manipulation politique où les larmes versées se convertissent en dividendes. Plus révoltant encore, nous assistons à une orchestration étatique de la solidarité, particulièrement au Maroc, où les manifestations pro-palestiniennes sont chorégraphiées par un pouvoir qui, dans l’ombre, facilite le transit d’armes vers Israël via ses ports.

    Cette schizophrénie morale atteint son paroxysme quand ces mêmes voix, si promptes à dénoncer les atrocités à Gaza, restent muettes face aux bombardements au Yémen. Le verset coranique nous rappelle pourtant avec sagesse : « Que la haine d’un peuple ne vous pousse pas à être injuste ». Ces manifestations théâtrales, ces indignations sélectives ne sont qu’un simulacre de solidarité, une mascarade qui insulte la véritable compassion humaine.

    La vraie justice exige une cohérence morale, une dénonciation universelle de l’oppression, qu’elle frappe à Gaza ou à Sanaa. L’authenticité de notre engagement se mesure à notre capacité à nous élever contre toute injustice, sans calcul, sans agenda caché, fidèles à l’enseignement divin qui nous commande l’équité absolue.

    Abou Stroff
    23 février 2025 - 7 h 04 min

    « A notre tour d’accuser la majorité des intellectuels arabes et musulmans d’imposture morale, d’humanisme à géométrie variable, d’indignation sélective. » avance K. M..

    question à un doro: pourquoi parle t on d’intellectuel arabe et/ou d’intellectuel musulmans alors que personne n’oserait parler d’intellectuel « aryen » ou d’intellectuel noir ou d’intellectul jaune ou d’intellectuel catholique ou d’intellectuel protestant ou d’intellectuel juifs, etc.?

    réponse gratuite: il n’y a en a aucune de rationnelle, et il nous faut admettre que cette histoire d' »intellectuel arbo-musulman » est une construction idéologique reposant sur deux fictions, à savoir la soi disant oumma arabe ou la soi disant oumma islamia.
    en termes crus, je pense qu’un individu analysant concrètement une réalité concrète, devrait éviter d’utiliser ce terme d’intellectuel arabo-musulman qui dissimule la réalité au lieu de l’éclairer.

    wa el fahem yefhem

    Lee Chung
    22 février 2025 - 17 h 32 min

    Ceux qui sont a blâmer dans cette histoire ce sont les Iraniens qui instrumentalisent les Houthis tout en restant bien au chaud chez eux a Téhéran. Après,la réaction des Saoudiens et de leurs alliés a été très violente dans la tradition du fondateur du royaume ( Saoud) qui n’avait pas hésité a massacrer des milliers de civils pour prendre la Mecque dans les années 1920 avec l’aide de son armée de bédouins fanatiques ( les Ikhwan) endoctrinés par un imam de pacotille ( Abd El Wahab) et appuyés militairement par les Britanniques. Bref,je continue a penser que les Iraniens sont le cancer de la région. Ils veulent prendre le contrôle du monde musulman alors que c’est juste des clowns. Des clowns dangereux qui apportent le malheur . Et l’addition ce sont des centaines de milliers d’innocents qui la paient. Bref, incroyable comment la vie humaine n’a pas de valeur pour ces gens avec leur martyrologie a la con

    Dr Kelso
    22 février 2025 - 11 h 08 min

    Je rappelle que l’entité sioniste est partie prenante dans la guerre au Yémen …Un Détail De L’Histoire…
    Les Yéménites sont d’ailleurs de fervent soutien des Palestiniens.
    Allah yrahmoum

    MADANI
    22 février 2025 - 10 h 45 min

    Je fais partie de « ces millions d’hypocrites arabes et musulmans » qui n’ont pas réagi au martyr du peuple yéménite car nos libres médias algériens se sont tus par censure ou par autocensure.
    Nous sommes dans la realpolitics du deep state et cela continue avec la Palestine, le Sahara Occidental, le Soudan, la Somalie, la Cachemire, les Rohingyas de Birmanie tous musulmans sans oublier les malheurs sans fin du peuple congolais dont nos médias ne parlent jamais ou si peu.
    Bravo à la Ligue Arabe, à l’OCI, à l’UA, à l’ONU où nous siégeons et faisons du surplace.
    Les peuples martyrisés attendent plus que des paroles et des votes mais des actes, des actes et encore des actes..
    .

    Canisbellis
    22 février 2025 - 8 h 54 min

    les plumitifs pré-payés pseudo-intellectuels arabes sont des chameaux chargés de devises étrangères, ils font parti de la caravane de l’information orientée (-tale). Les yémenites peuple valeureux a prouvé que la pauvreté des moyens requièrent autant de fièrté et de courage pour lutter contre les forces du mal.
    Vive le Yémen libre !

    Abou Stroff
    22 février 2025 - 7 h 44 min

    « En revanche, depuis le 9 octobre 2023, ces mêmes intellectuels s’activent sans relâche pour dénoncer le massacre des Palestiniens de Gaza. Pourquoi cette indignation sélective, cet humanisme à géométrie variable ? Est-ce parce que les auteurs du génocide des Palestiniens sont juifs et, à cet effet, méritent une réprobation et une condamnation sans appel, du seul fait de leur judéité par essence fautive et punissable? » s’interroge K.M..

    je pense que les « intellectuels » arabo-musulmans, dans leur grande majorité, ont été formatés pour croire que le monde, dans son entièreté, est divisée entre musulmans et non-musulmans.

    par conséquent, leur psyché ne peut pas appréhender et/ou imaginer un conflit inter-« musulmans » puisque chacun sait qu’un musulman ne peut être que ……………… le frère d’un autre musulman.

    exit donc, la défense d’intérêts palpables et quantifiables des couches compradores dirigeants les sociétés « arabo-musulmanes », les alliances entre le Grand Capital et des couches sociales compradores, l’existence d’intérêts palpables et quantifiables entre la mouvance sioniste et la mouvance islamiste et, last but not least, la convergence d’intérêts entre l’entité sioniste et certains régimes arabo-musulmans.

    moralité de l’histoire: il n’y en a aucune, à part que les « intellectuels » arabo-musulmans semblent vivre dans un monde virtuel, i. e. un monde des Bisounours, où tous ceux ne se reconnaissent pas en tant que musulmans sont des ennemis à abattre, quant aux « musulmans », ils sont, par définition, …………….. irréprochables.

    PS: je pense que K. Boulaziz adopte, dans ses écrits (du moins ceux que je lis sur AP), la posture classique des « intellectuels » arabo-musulmans » en insérant le conflit palestino-sioniste, non pas dans une problématique de colonisation qui ne peut être dépassée que par un processus de décolonisation, mais en l’appréhendant comme un conflit de religion et/ou de civilisation.

    (…)

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