Mauvaise foi
Par Khider Mesloub – La cheffe de file des députés Rassemblement national file un mauvais coton. Depuis sa condamnation à quatre ans de prison ferme, dont 2 en sursis, et cinq ans d’inéligibilité immédiate, pour détournement de fonds publics, Marine le Pen ne cesse de fustiger la justice. L’ancienne avocate s’est enfermée dans le déni en ne reconnaissant pas le verdict de la justice française. Elle dénonce une décision politique.
«L’Etat de droit a été totalement violé», a-t-elle maugréé, lors de sa première prise de parole après sa condamnation. «Des millions de Français vont être privés de leur candidate qui est aujourd’hui favorite à l’élection présidentielle», a-t-elle argué sur TF1. Dénonçant une «décision politique» et estimant qu’il s’agit d’un «jour funeste pour [notre] démocratie», la patronne du RN a ajouté : «Je ne vais pas me laisser éliminer ainsi.»
Marine le Pen est non seulement de mauvaise foi, mais elle est également une mauvaise perdante.
De mauvaise foi, car elle feint d’ignorer qu’elle a été éliminée à trois reprises lors des élections présidentielles précédentes, non pas par la justice, mais par le peuple français qu’il a désavoué.
Mauvaise perdante, car, en dépit de ses multiples échecs électoraux à la fonction présidentielle, elle persiste à imposer sa candidature aux membres de son parti, le Rassemblement national, parti qu’elle dirige d’une main de fer.
Le comble du cynisme, c’est que Marine le Pen, avocate de formation, dénonce la décision de la justice qui l’a condamnée à deux de prison et à cinq ans d’inéligibilité immédiate. Elle a dénoncé la sévérité de la condamnation qu’elle a qualifiée d’inique. Son poulain Jordan Bardella a, quant à lui, fustigé au micro de CNews/Europe 1 «la tyrannie des juges». Rien que ça !
Ce sont les mêmes politiciens et journalistes qui, à propos des mineurs de 13/14 ans coupables de petits larcins, exigent à leur encontre des condamnations sévères exemplaires, des peines d’emprisonnement ; autrement dit, ils réclament la suppression de l’excuse de minorité pour juger dorénavant les adolescents comme des adultes, s’offusquent de la sévérité de la condamnation de Marine le Pen. Ils ordonnent l’application d’une justice des mineurs pour la cheffe de file du RN.
En France, la justice des mineurs repose sur l’ordonnance du 2 février 1945, qui posait les bases d’une justice adaptée aux jeunes, fondée sur l’éducation et la réinsertion plutôt que sur la répression.
L’enfant doit rester un enfant et ne doit pas être vu comme l’auteur de faits contraires à la loi. Et la sanction doit être proportionnée, demeurée essentiellement pédagogique et éducative. L’enfant délinquant a le droit de bénéficier d’une justice spécialisée et ne doit pas être considéré comme un adulte délinquant.
L’adulte délinquante Marine Le Pen exige d’être jugée en mineure. Autrement dit, de bénéficier de l’excuse de minorité pour atténuer, voire se soustraire aux sanctions pénales et condamnations judiciaires électorales appliquées à l’encontre des coupables adultes.
N’importe quel délinquant condamné à de la prison ferme est automatiquement banni de la société. Voué à sombrer dans la clandestinité sociale. Or, la délinquante Marine le Pen, condamnée à deux ans de prison ferme pour détournement de fonds publics, à peine le verdict prononcé, est reçue en vedette le soir même sur la première chaîne d’information TF1, comme si elle venait de remporter le prix de la probité morale et de l’incorruptibilité politique.
Deux poids, deux mesures.
K. M.
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