En marge de la 27e édition de la Bourse archéologique de Paestum, le président de cette importante foire, l’Algérien Mounir Bouchenaki, a bien voulu répondre à nos questions, notamment celles portant sur le secteur archéologique en Algérie.
Algeriepatriotique : Tout d’abord, nos félicitations pour votre nomination en qualité de président de la Fondation Romualdo Del Bianco de Florence…
Mounir Bouchenaki : Je vous remercie et je veux partager cet honneur qui m’a été fait avec mes compatriotes, en cette date commémorative de la glorieuse Révolution du 1er Novembre 1954. Les italiens me connaissent bien et se souviennent des premières fouilles auxquelles j’ai participé en 1968, c’était en Sardaigne et on devait récupérer des vestiges puniques et phéniciens, dans la partie ouest de l’île. En me choisissant, cette prestigieuse fondation a probablement voulu renouer avec cette relation spéciale qui a toujours existé entre les archéologues de nos deux pays.
La Bourse de Paestum continue d’attirer chaque année les experts du monde entier et l’Algérie y est toujours bien représentée…
Cette édition a été un succès sur toute la ligne. Nombre de pays participent en faisant la promotion de leur patrimoine archéologique. Les universités sont associées pour bien marquer le lien indissociable entre passé à promouvoir et à conserver pour les générations à venir. C’est d’ailleurs le cas de notre pays, qui est une destination très prisée chez les experts, tant italiens qu’internationaux.
Moi-même j’ai eu à répondre à des médias italiens qui, sachant que je suis algérien, m’ont questionné sur les prochaines nouveautés de l’offre touristique de notre pays.
A ce propos, vous comptez vous rendre en Algérie dans les prochains jours…
Algeriepatriotique en a parlé au mois d’avril. En effet, j’ai été invité par le ministère de la Culture, pour aider à définir un plan de travail national et établir une liste de sites éligibles au patrimoine universel de l’Unesco, tant archéologique que naturel.
Sitôt annoncé, une équipe d’experts a travaillé d’arrache-pied de manière très approfondie et a remis aux autorités responsables et au ministère de tutelle une liste indicative de dix sites, disséminés sur tout le territoire national, ayant vocation à faire partie du patrimoine mondial. Un premier choix a été fait pour présenter quatre dossiers : les Mausolées royaux numides de Medghassen, d’El-Khroub, de Syphax à Aïn Temouchent et Jedar à Tiaret. Je puis d’ores et déjà vous affirmer que nous allons bientôt atteindre cet objectif.
D’autres sites, puniques, numides, romains et arabo-musulmans, feront l’objet du même suivi, pour compléter les dossiers qui seront, in fine, présentés à l’Unesco pour leur inscription au Patrimoine universel.
Avec mes collègues, nous avons appuyé le choix de sites qui illustrent toutes les civilisations qui ont façonné l’histoire et la personnalité de l’Algérie et qui font de notre pays un creuset plurimillénaire de la civilisation humaine.
Est-ce qu’on peut qualifier cette liste de virage résolu pris par l’Algérie dans le domaine du patrimoine archéologique ?
Je pense que oui. Une fois que nos experts ont pris acte de l’importance de présenter des projets complets, en tenant en compte de l’importance du suivi et des infrastructures d’accueil, qui sont à la base de l’offre touristique de type archéologique, leurs conclusions et expertises ont permis une rapide avancée dans la sélection et la préparation des dossiers des divers sites en question.
C’est un fait que nul ne peut discuter. J’ai mesuré depuis quelques années chez nos responsables la volonté de se réapproprier un pan entier de notre histoire, pour léguer aux générations futures le devoir de rendre hommage à nos glorieux martyrs, et ce, en édifiant une Algérie fière de son histoire, tout en étant résolument orientée vers l’avenir.
Un mot pour conclure ?
Lorsque, en 1998, le Temple de Paestum a été inscrit au patrimoine universel de l’Unesco, cette petite ville comptait un seul hôtel de haut standing. Aujourd’hui, elle en possède 55. Les universités des villes limitrophes ont institué des cours d’archéologie qui affichent complet.
Ce temple témoignant de la domination grecque du sud de l’Italie est perçu de nos jours comme une ressource hautement stratégique pour l’économie de Paestum. Ce choix intelligent doit nous inspirer pour pérenniser l’éclat et le rayonnement de nos sites et créer les bases d’expertises nationales à tous les niveaux.
Interview réalisée à Rome par Mourad Rouighi


