Crise migratoire, Maroc, gaz : que veulent les Espagnols de l’Algérie ?
Par R. Mahmoudi – Les visites de hauts responsables espagnols en Algérie se succèdent à un rythme soutenu, laissant entrevoir de sérieuses préoccupations du côté de Madrid. Ainsi, après le déplacement du ministre de l’Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, c’est au tour du chef de la diplomatie, Josep Borrell Fontelles, de se rendre à Alger.
Si peu de choses ont filtré des discussions qu’ils ont eues avec les responsables politiques algériens, on devine les principaux thèmes soulevés par les deux responsables espagnols. La première question qui préoccupe actuellement au plus haut point le gouvernement espagnol demeure la crise migratoire. Pressé par les vagues humaines qui continuent à affluer vers la presqu’île ibérique, Madrid, comme toutes les capitales européennes, souhaiterait voir Alger «faire plus d’efforts» pour juguler ce fléau, en créant des centres de rétention – demande rejetée immédiatement par Alger -, sinon en acceptant de «coordonner» avec le voisin de l’Ouest, le Maroc, pour un meilleur verrouillage des frontières.
Le gouvernement espagnol s’est même proposé de jouer les médiateurs entre les deux pays maghrébins pour les amener à aplanir leurs différends et à se consacrer à cette tâche si vitale pour la rive nord de la Méditerranée. Il se trouve, toutefois, que sur ce dossier, l’Espagne semble totalement débordée et provoque à chaque fois des crises avec le royaume du Maroc. Car, en définitive, les Espagnols eux-mêmes sont pointés du doigt par les ONG internationales qui les accusent de mauvais traitements infligés aux migrants clandestins.
Ainsi, Amnesty International, dans son dernier communiqué rendu public vendredi, accuse les autorités espagnoles d’avoir expulsé, le 23 août dernier, un groupe de 116 migrants originaires de différents pays d’Afrique subsaharienne, les renvoyant depuis l’enclave espagnole de Ceuta vers le Maroc. Les migrants en question avaient passé moins de 24 heures en Espagne alors que leurs avocats n’étaient pas informés que leurs clients devaient être expulsés en moins de 24 heures, les privant de la possibilité de contester efficacement leur renvoi. L’ONG explique que les risques potentiels auxquels ils pourraient être exposés au Maroc n’avaient pas été évalués.
Par ailleurs, profitant de cette conjoncture particulière, Madrid se sent aujourd’hui obligé de se rapprocher d’Alger pour s’assurer du maintien de son approvisionnement en gaz naturel. Sachant que l’Espagne importe 57% de ses besoins en gaz d’Algérie, l’enjeu pour les Espagnols est d’éviter de dépendre, à l’avenir, de la Russie, premier fournisseur de l’Europe.
En somme, sur la question de l’immigration clandestine comme sur celle du gaz, l’Espagne a plus que jamais besoin de l’Algérie.
R. M.
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