Pardon sélectif
Par R. Mahmoudi – La décision annoncée par le président français de reconnaitre, enfin, la responsabilité de la France dans l’assassinat de Maurice Audin en 1957, a quelque chose d’inachevé, pour au moins deux raisons. D’abord, la focalisation sur le syndrome de la torture participe du même débat biaisé qui occulte de la reconnaissance des crimes commis par l’armée française en Algérie durant la période coloniale, et celui den la condamnation du fait colonial. Un pas que Macron n’ose pas franchir, alors qu’il a été le premier, en février 2017, lors de sa visite à Alger en tant que candidat à la présidentielle, à qualifier la colonisation de crime contre l’humanité».
Si le geste a été globalement bien accueilli, et salué notamment par le gouvernement et des organismes algériens «comme un pas en avant», des voix ne se sont pas empêchées de reprocher Macron le caractère sélectif de son geste. Pourquoi demander pardon à la famille de Maurice Audin, martyr algérien d’origine française, mais pas aux familles de l’ensemble des victimes algériennes ?, se plaint-on.
Or, on s’en souvient, la première à avoir relancé, en France même, la polémique sur la torture pratiquée par l’armée coloniale française en Algérie, ce fut la moudjahida Louisette Ighil-Ahriz dans son témoignage au journal Le Monde, paru en 2001. Un mouvement de sympathie avec l’ancienne fidaïa de la bataille d’Alger a vite donné lieu à une prise de conscience salutaire dans l’opinion française qui a abouti, quatre ans plus tard, à l’abrogation de l’infâme loi du 23 février 2005 faisant l’apologie de la colonisation ; bien que tout cela n’ait pas eu totalement raison du dogmatisme si tenace des politiques, de gauche comme de droite, avec une pensée politique régressive nourrie à la xénophobie et aux idées de l’extrême-droite.
Cette reconnaissance de la responsabilité de l’armée française dans l’assassinat de Maurice Audin fait suite à un hommage qui lui a été rendu, dès 2012, par l’ex-président François Hollande à sa venue en Algérie. Cela n’a pas révolutionné les choses.
R.M.
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