Les propositions du général Nezzar pour amorcer les réformes politiques
Nous publions le texte intégral des douze propositions faites par l’ancien ministre de la Défense nationale, le général à la retraite Khaled Nezzar, devant la commission Bensalah en mai 2011. Les recommandations de l’ancien membre du Haut Comité d’Etat avaient été proposées dans le sillage des réformes politiques qu’avait annoncées le président Bouteflika et considérées par le général Nezzar comme «un dispositif fondamental par lequel sera parachevé l’édifice institutionnel et législatif national». Son initiative en douze points est d’une brûlante actualité.
Contribution du général à la retraite Khaled Nezzar aux réformes énoncées par le président de la République
Ayant reçu une invitation à participer aux consultations en vue de déboucher sur des réformes politiques profondes à quoi s’est engagé solennellement Monsieur le président de la République, j’ai décidé d’y répondre positivement.
En voici les raisons :
D’abord, parce que nous sommes en présence d’un engagement solennel du président de la République. Partant de là, je considère ces réformes comme un dispositif fondamental par lequel sera parachevé l’édifice institutionnel et législatif national. Il est susceptible de hisser la République algérienne au niveau d’un Etat de droit attendu depuis l’aube de l’Indépendance. Il répond aussi – et c’est normal – à la nécessité de passage du flambeau aux nouvelles générations. A ce titre, et bien que le projet de réforme annoncé n’ait pas mentionné spécifiquement ce sujet, néanmoins, une suggestion s’impose. Celle-ci se rapporte aux fonctions de l’Etat. La Constitution future devra, dans ses dispositifs, mettre en exergue l’importance et l’intérêt que doit revêtir cette question si l’on veut améliorer le fonctionnement des services publics.
Si l’enjeu consiste en une révision constitutionnelle consacrant l’Algérie comme Etat de droit, et dans la mesure où tel est le but visé, je souligne publiquement la portée historique de la chance qui nous est offerte au risque d’être déçus une fois de plus. Le non-aboutissement de nos aspirations vers plus de liberté et vers une quête d’une meilleure gouvernance pour son pays ne constitue nullement un échec pour celui qui y adhère ou qui y croit. Bien au contraire.
Ayant été membre du Haut Comité d’Etat, qualité qui me vaut aujourd’hui cette invitation qui me permet cette participation, je ne peux manquer l’occasion de souligner les points suivants sur lesquels notre future Constitution amendée ne devra laisser subsister aucune confusion, ni ambigüité. Elle doit garantir :
1) La pérennité du caractère républicain et démocratique de l’Etat.
2) L’organisation de l’alternance au pouvoir, avec égalité des chances d’accès aux instances délibérantes et aux exécutifs élus, ceci à tous les niveaux de l’autorité de l’Etat.
3) L’inviolabilité et la protection des droits de l’opposition et de la minorité parlementaire dans un climat de paix civile.
4) La primauté de la légitimité constitutionnelle pour toute question touchant au temporel et aux droits du citoyen.
5) Le respect de la liberté d’expression et des libertés publiques. Le droit de manifester pacifiquement doit être effectif, y compris à Alger.
Nota
Si de tels principes et mécanismes étaient en vigueur dans la Constitution de 1989, il n’y aurait eu nul besoin de recourir à la suspension du processus électoral pour la sauvegarde de la voie démocratique.
Une nécessaire crédibilité
D’ores et déjà, la démarche du Président gagnerait considérablement en crédibilité :
6) par la mise au point définitive des textes et leur approbation émanant d’une instance ou d’un organe qui échappe à l’influence partisane.
7) La future commission devant étudier la réforme constitutionnelle doit pouvoir se prononcer sur la question de la limitation du mandat présidentiel sur option de Monsieur le président de la République.
Propositions
8) Au sujet de la loi électorale, s’il y a bien un domaine où l’autorité publique est handicapée par un déficit de crédibilité, c’est bien en matière électorale. Il y a donc lieu de rechercher et mettre en place des mécanismes et des procédures rendant les scrutins irréprochables.
Au sujet de la loi sur les partis politiques, je ne peux avancer de dispositif précis, cependant,
9) que les dossiers d’agrément déjà déposés depuis fort longtemps et non encore agréés pour des motifs «administratifs bureaucratiques» puissent l’être ; à tout le moins, qu’ils puissent d’ores et déjà être mis en position de se préparer le plus tôt à participer aux élections futures.
10) Envisager des procédures pour que l’ensemble des formations politiques, syndicales et autres satisfassent également aux exigences démocratiques en leur sein, afin d’éviter la grande déperdition de cadres et surtout préserver leur représentativité.
Recommandations
11) Afin de renforcer la crédibilité du projet de réforme présidentiel, il y a lieu d’opter pour une législation par ordonnances. Cette démarche vise à contourner l’instance législative actuelle.
Ces mêmes projets de loi devraient être élaborés par une commission indépendante.
L’information
12) La nouvelle loi devra restaurer les prérogatives d’une autorité de régulation indépendante et de promotion médiatique dans le respect des règles de déontologie.
Khaled Nezzar
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