L’armistice impérialiste
Par Mesloub Khider – Le 11 novembre 2018 marque le centenaire de l’armistice. A cette occasion, la France impérialiste commémore fièrement cette boucherie. Cette sanguinaire guerre durant laquelle le capital s’est nourri de la chaire déchiquetée des prolétaires transformés en soldats appelés à s’entre-tuer pour la défense de la patrie capitaliste.
Contrairement à la propagande médiatique et étatique, l’armistice de 1918 ne constitue pas la fin de la guerre, encore moins la fin des guerres, scandé par le fameux «plus jamais de guerre», ou «c’est la der des ders», pour la simple raison que l’arrêt de la guerre, décidé dans l’urgence au lendemain de la révolution bolchevique, n’a jamais éliminé les causes de l’éclatement de la guerre en 1914. Elles étaient réunies à la veille de la Première Guerre mondiale, tout comme elles sont encore toujours amplement réunies à notre époque. En vérité, c’est la menace révolutionnaire ouvrière qui a précipité la «fin de la guerre».
Pour preuve du danger révolutionnaire ayant précipité l’arrêt de la guerre, voici ce que déclarait Lloyd George : «Toute l’Europe est pétrie de l’esprit de la révolution. Il n’y a pas seulement un sentiment profond de mécontentement, mais également de colère et de révolte parmi les travailleurs (…). L’ensemble de l’ordre existant, aussi bien dans ses aspects politiques, sociaux et économiques est remis en question par les masses populaires d’un bout de l’Europe à l’autre» (Lloyd George, Premier ministre britannique dans un mémorandum secret adressé au Premier ministre français Georges Clemenceau, en mars 1919).
Tous ces Etats, la veille encore en guerre entre eux, ce sont solidarisés dans une coalition anticommuniste pour mener la guerre au nouveau régime soviétique. La veille, toutes les bourgeoisies nationales belligérantes se livraient une guerre sanguinaire pour s’attribuer des territoires au prix du sacrifice de 20 millions de prolétaires morts sur les champs de bataille et des millions de blessés, mais devant la menace révolutionnaire ouvrière, ces mêmes bourgeoisies «ennemies» se sont réconciliées pour resserrer leur rang en vue d’affronter la nouvelle république soviétique avec des armées provenant de 21 pays. Ces Etats ont armé et financé l’«armée blanche», provoquant le début d’une guerre civile. Ainsi, la guerre impérialiste a été transformée en guerre contre la classe ouvrière en Russie mais aussi dans d’autres pays, en Allemagne où la révolution a été écrasée dans le sang, de même en Hongrie.
Tous les Etats capitalistes de l’époque ne nourrissaient aucune illusion sur la portée de cette paix imposée par le déclenchement de la révolution bolchevique et de son extension au reste de l’Europe. Cette paix était d’emblée condamnée à l’échec, notamment du fait de l’exacerbation des rancœurs manifestées par l’Allemagne à la suite de l’imposition de l’inique traité de Versailles. Mais aussi en raison des tensions ethniques et frontalières nées à la suite de la création de nouveaux Etats. En vérité, l’armistice représente une simple pause pour mieux préparer de nouvelles imminentes et inévitables guerres inscrites dans les gènes du capitalisme.
Il ne faut pas oublier que la Première Guerre mondiale marque l’entrée du capitalisme dans l’ère des guerres permanentes. De même, l’issue de la guerre est responsable de la naissance des mouvements fascistes et hitlériens.
En Allemagne, Le «traité de paix» de Versailles a donné lieu au développement de sentiments vindicatifs répandus parmi de larges couches de la population allemande, pépinière du nouveau parti national socialiste fondé par Hitler. De même, la Première Guerre mondiale a été responsable de l’installation du fascisme en Italie.
Au reste, l’armistice du 11 novembre 1918 n’a absolument pas ouvert une période de paix. Au contraire, il a conduit à une succession ininterrompue de conflits (guerre gréco-turque, guerre du Rif, guerre sino-japonaise, guerre d’Ethiopie, guerre d’Espagne, etc.), aboutissant à la Seconde Guerre mondiale.
En réalité, l’expression la plus idoine pour marquer ce centenaire écoulé serait, non pas «traité de paix» (armistice), mais traité de guerres permanentes. Car, au sein du capitalisme, la paix n’existe pas. Le capitalisme porte la guerre en lui comme les nuées l’orage. L’histoire du XXe siècle nous l’a amplement démontré : des dizaines de conflits guerriers ont émaillé notre monde moderne capitaliste civilisé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale (Corée, Vietnam, Moyen-Orient, etc.).
Enfin, l’Algérie n’avait pas à s’inviter à cette commémoration du centenaire de l’armistice de la guerre impérialiste du 11 novembre 2018, par la présence du Premier ministre. D’autant plus qu’elle a payé un lourd tribut au cours de cette boucherie, par le sacrifice de milliers d’Algériens enrôlés de force dans les armées françaises coloniales.
L’Algérie n’avait pas, par sa représentation officielle aux commémorations, à se fourvoyer dans la célébration de cet armistice, signé au moment où elle subissait à cette époque le joug colonial de la France.
C’est une fête impérialiste franco-française. Qui plus est, par le déploiement de sa propagande actuelle, a pour dessein d’embrigader les esprits en vue des futurs affrontements guerriers, de la future guerre mondiale.
M. K.
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