Le «rinforzando» contestataire algérien
Par Nazim Maiza – Nous avons vécu le onzième vendredi de contestation populaire massive sans aucune perspective de dénouement pour le moment.
Sur la chaîne de télévision nationale, tout semble normal, pas lieu de s’inquiéter, les activités des ministres sont rapporté le plus normalement du monde et, de temps à autre, un limogeage vient agrémenter les nouvelles et réconforter partiellement les Algériens.
Il est fort probable que le pouvoir algérien, incarné dans la puissante ANP, maîtresse incontestable des lieux présentement, applique «religieusement» la méthode hétérodoxe qui consiste à non seulement gagner du temps en misant sur l’essoufflement de la dynamique contestatrice au cours du mois de Ramadhan, mais aussi en s’enlisant dans un paradoxe qui est le maintien du cheminement constitutionnel en faveur de l’article 102 sans prendre en compte la limitation des prérogatives d’un gouvernement de transition toujours dans une légitimité constitutionnelle qui penche selon le contexte.
En vérité, le respect de la Constitution est bancal. La lecture partielle et partiale des lois va dans le sens unique.
D’un point de vue stratégique dans la «gestion de crise», cette sempiternelle obsession constitutionnelle de l’ANP réduit considérablement les chances de sortir de ce méli-mélo spécifiquement politique. L’approche constitutionnelle adoptée par le pouvoir semble tenir la route pour le moment. En effet, les tacticiens des Tagarins n’ont pas lieu de s’inquiéter, certes, le peuple est grognard mais nullement belliqueux.
Bien que l’optimisme des Algériens demeure intact, il n’en est pas moins que beaucoup craignaient l’effondrement de l’économie nationale qui amènerait avec elle son lot de problèmes «vitaux» pour le salarié citoyen de base, c’est-à-dire la composante essentielle du peuple en Algérie. La nouvelle du rehaussement des retraites annoncée récemment a provoqué un double effet : non seulement elle a suscité une incompréhension générale parmi la population, mais en même temps, elle a créé le «rinforzando» contestataire que nous avons constaté ce vendredi.
De nombreux spécialistes caractérisent le hirak algérien comme étant une première dans le monde. Cela s’explique en grande partie par le pacifisme et l’originalité des slogans portés, en plus de l’autodérision dont font preuve les Algériens.
Aujourd’hui, il est clair que le pays entre dans une crise inédite dont les solutions s’amoindrissent de semaine en semaine. L’entêtement du pouvoir à rester dans une légitimité constitutionnelle irrite le peuple. Les lièvres «communicationnels» incarnés dans les Salhi et autres Nekkaz qui, certes, font le buzz sur le Net, ne suffiront plus à distraire les Algériens en ce mois de Ramadhan.
Espérons que les jours à venir apporteront un vent de sagesse qui fera que nos décideurs prendront conscience du danger que représente la passivité dans la prise de décision politique en vue d’une élection présidentielle dans un climat de sérénité partielle. Un climat qui ne peut être effectif que par l’installation d’un gouvernement de transition avec une figure consensuelle à la tête de l’Etat.
Le vent de sagesse doit apparaître et secouer les esprits «légalistes» qui défendent une Constitution bancale et exaucer avec célérité le vœu du peuple algérien. Faire autrement équivaudrait à mener une politique naufrageuse pour la nation tout entière.
N. M.
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