Discours adapté ?
Par R. Mahmoudi – La grande fermeté avec laquelle le chef d’état-major de l’ANP a réitéré, dans son dernier discours, son rejet de toute transition politique et son attachement à l’élection présidentielle contraste très ostensiblement avec ses appels pressants exhortant, dans le même discours, les manifestants à se structurer et à désigner des représentants crédibles et la classe politique à prendre l’initiative, tout en enjoignant aux autorités d’accélérer la mise en place d’une commission indépendante de l’organisation de la présidentielle.
Si, comme il le dit et le répète, seules les élections peuvent prémunir le pays d’«un vide institutionnel» porteur de tous les périls, qu’attendrait-il des représentants du mouvement citoyen ou des initiatives émanant des personnalités politiques : les intégrer dans le processus électoral ? Techniquement et politiquement, cela paraît, à l’évidence, irréalisable en un temps aussi court. Car, non seulement l’idée d’un scrutin dans les conditions actuelles est massivement rejetée mais, surtout, il faudrait des garanties sérieuses qui exigent au préalable l’ouverture d’un dialogue. Le pouvoir, c’est-à-dire le commandement de l’armée ou ceux qui le représentent, va-t-il accepter de dialoguer avec les animateurs du mouvement populaire et les personnalités nationales ? Le général Gaïd-Salah ne le dit pas franchement dans sa dernière adresse mais n’exclut rien.
A ce titre, il aurait pu répondre aux différentes propositions formulées à la veille de son discours par au moins cinq personnalités nationales reconnues, qui avaient appelé à l’annulation de la présidentielle du 4 juillet et à l’ouverture d’une courte transition dont l’objectif essentiel est de mettre en place des mécanismes de préparation de nouvelles élections. Il n’y a même pas fait allusion.
Mieux, le reproche qu’il a fait aux «personnalités et compétences nationales» d’être restées en retrait de la dynamique actuelle donne à croire que son discours aurait été préparé et rédigé avant la diffusion des initiatives lancées respectivement par Ahmed-Taleb Ibrahim, Abdelaziz Rahabi et Ahmed Benbitour. Ce qui n’écarterait pas l’hypothèse d’un nouveau discours, plus adapté aux demandes de la classe politique et de la rue, dans les tout prochains jours.
R. M.
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