Dialogue impossible ?
Par Bachir Medjahed – On a l’impression que les grilles de lecture de l’état-major et du hirak ne se croisent pas. Le peuple veut – ou plutôt exige – que soit levée toute tutelle qui s’exerçait sur lui. «Par et pour le peuple» n’est qu’un slogan creux. Ceci explique cela. Tout individu qui s’estime exclu du système cherche à détruire celui-ci. Quant aux tenants du système, ils croient que le peuple demeure figé dans sa réflexion, et donc éternellement inhibé.
Or, la société a changé depuis l’indépendance nationale, à part ceux qui ont eu à conduire les institutions de souveraineté. Le système a engendré les hommes formés dans le même moule. Bouteflika est là pour justifier le système, à savoir qu’en 1962 les populations criaient «sept ans, ça suffit !» et, dernièrement, c’était pratiquement le même slogan. Qu’est-ce qui a «tant congelé» pour une reconduction du même slogan ?
Depuis 1962, aucune légitimité électorale n’a été conférée à quiconque. Tous les pouvoirs successifs n’ont pas eu besoin de s’appuyer sur des élections mais, par contre, ils s’appuyaient sur des allégeances. On dit encore que la clientèle bénéficiait de la redistribution de la rente, c’est-à-dire d’une ressource «en dehors de notre économie».
C’est quoi, alors, le système puisqu’on ne peut pas dire «qui» il est ? Si on exclut les hommes qui sont débarqués de la rente, le système est un ensemble de cooptations et de comportements qui privilégient le «nous restons ensemble» sur les clans qui préfèrent les luttes en solitaire. L’attrait du pouvoir sans coloration ou plutôt la volonté de demeurer au pouvoir est supérieure à celle de vouloir accéder au pouvoir en s’appuyant sur des idéologies qui interdisent un long parcours commun.
Serait-il possible de mettre sereinement en place une Assemblée constituante face à l’acharnement des islamistes à créer l’alliance verte ? Que restera-t-il de la coordination de l’opposition sachant qu’en son sein le pilier vert est capable de s’identifier et de préserver sa propre autonomie ?
Autant dire que le dialogue est déjà condamné. Au sein de l’opposition démocrate, l’action isolée est inefficace, tandis que l’action concertée est impossible.
B. M.
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