Ce que le peuple veut, Dieu le veut
Par Abdelkrim Khelifi – Alors qu’elle vient de fêter le 57e anniversaire de son indépendance, l’Algérie vit, depuis plus de vingt semaines maintenant, sous le regard des peuples du monde, une aventure historique, de nature quasi existentielle, sans aucun précèdent connu, engageant son avenir de nation et celui de ses enfants.
Epique au plein sens du terme, celle-ci occupera, elle occupe déjà, une haute place dans l’histoire de notre pays, au même titre que le glorieux 1er Novembre dont elle peut, en toute légitimité, prétendre vouloir réaliser le rêve, longtemps contrarié.
Mais si, à l’évidence, chacun de nous aura observé avec fierté qu’aucun Algérien n’y est resté insensible, l’autre réel motif de satisfaction est de pouvoir également noter que, par la spontanéité de sa survenue, par son admirable engagement citoyen au service de son pays et de son avenir, notre soulèvement populaire national aura fait vibrer les cœurs et les esprits et réveillé les consciences de millions d’Algériens où qu’ils se trouvent.
Ceci étant, s’il est naturel de voir chacun de nous légitimement revendiquer son sincère attachement à son pays, de déclarer son patriotisme, le spectacle unique, inédit, que la multitude citoyenne des «Vendredis référendaires» nous donne à voir depuis le désormais historique 22 Février, nous enseigne que l’expression la plus authentique de ce noble sentiment, la seule qui vaille, lui appartient en tant que peuple, tout comme lui revient de droit la souveraineté sur son pays. Leçon d’humilité magistrale à chacun de nous !
Pour l’avoir observé, voire étudié, de nombreux peuples du monde ont déclaré leur admiration sincère, rendant ainsi hommage à un grand peuple. Ainsi, par son comportement exemplaire, le hirak de notre jeunesse aura forcé respect et considération au niveau planétaire.
Même si on pourrait y voir une bénédiction pour l’Algérie, ce soulèvement populaire pacifique se veut être avant tout l’expression sincère de la conviction de tout un peuple quant à la nécessité, plus d’un demi-siècle après son indépendance formelle, de prendre en main son propre destin. Et c’est précisément cette sincérité et la force de son expression qui confère une légitimité pleine et entière à ses demandes. Mouvement profond de toute la société, ce hirak national constitue, à n’en pas douter, une véritable «force tranquille», forte de la force de sa conviction, mue et servie par une intelligence collective remarquable qui entretient sa flamme et nourrit son âme.
Reflet de nos valeurs ancestrales, l’admirable communion populaire vécue sans faille ni faiblesse depuis plus de quatre mois maintenant, ne peut que forcer le respect par son sens élevé de la responsabilité. La leçon est assurément magistrale. D’où la présente contribution au débat citoyen ouvert.
Connaître, c’est pouvoir (knowledge is power), disent les Anglo-saxons. Pour connaître, comprendre et pouvoir agir intelligemment, revenir à son histoire – celle de notre pays, en l’occurrence – est toujours une étape incontournable et pleine d’enseignements pour qui veut faire œuvre utile. A cet égard, notre histoire récente suffira à éclairer notre réflexion sur l’urgence de l’heure. Pour ne plus décevoir et afin que nul n’en ignore.
Aussi, l’évocation de ces quelques repères historiques pourrait-elle s’avérer de quelque utilité : août 1962-février 2019. De l’été de la discorde, été fratricide et de tous les reniements, au Printemps de toutes les promesses, de tous les espoirs. De l’état-major général historique (Ghardimaou, Tunisie) à l’état-major de l’Armée nationale populaire (Les Tagarins, Alger), de la logique de «la force qui prime le droit» à celle où le «droit doit primer la force» in châ’ Allah ! Juste retour des choses ? Mektoub (destin) ? Les voies du Seigneur sont certainement insondables.
Il demeure cependant que, imperturbable, l’histoire en aura pris note et la mémoire du peuple, toujours infaillible, sait retrouver dans les strates de son passé toutes les atteintes à sa dignité. Il demeure tout autant qu’en ces heures graves imposées à notre pays, il est permis d’espérer voir tous les hommes de bonne volonté, que le destin semble avoir investis de l’historique, noble, mais délicate mission d’apporter leur décisive contribution au salut de leur pays, prouver à leur peuple qu’ils sont ses authentiques enfants et au reste du monde que l’Algérie a toujours été riche de ses femmes et de ses hommes.
«Vox populi, vox Dei» disait-on, à raison, dans la Rome antique et nous tous, dans l’Algérie d’aujourd’hui, ici et maintenant, disons d’une seule et même voix, celle de notre valeureux peuple : «Ce que le peuple veut, Dieu le veut».
Pour le reste, tout le reste, les nombreuses et généreuses contributions, aussi diverses que variées de nos intellectuels, universitaires, femmes et hommes de loi et autres cadres, constituent, à n’en pas douter, un fonds d’une valeur inestimable qui peut d’ores et déjà, loin de toute forme de «khechinisme» (entêtement) stérile, être mis à contribution pour sortir notre pays de l’impasse et lui préparer un avenir sérieux, solide, ensemble, unis, sincères, pour répondre aux aspirations de nos jeunes, au rêve des Aînés et garantir aux futures générations, une démocratie exemplaire et pérenne au seul bénéfice de l’Algérie.
A. K.
(Retraité)
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