Tabou français
Par Saïd N. – Au moment où les représentants politiques de la famille révolutionnaire algérienne (ONM, FLN) s’entredéchirent et se déclarent la guerre, un média français affiche un intérêt plus grand pour la «Toussaint rouge», vue ou racontée par des Algériens.
Ainsi, pour la première fois peut-être dans l’histoire, une chaîne de télévision française, Canal+, diffuse un film de guerre, «Patrouille à l’Est», d’Ammar Laskri, considéré comme l’un des plus emblématiques longs-métrages du cinéma algérien. Le film est passé mardi soir à une heure de grande écoute. C’est dire que la direction de cette chaîne l’aurait fait dans l’intention de cibler le plus large public possible.
Sans doute, ce choix de Canal+ traduit un sentiment de liberté et sûrement aussi un besoin, chez les Français, de connaître la version algérienne – qu’ils ont longtemps ignorée ou méprisée – de l’histoire de la colonisation et de casser enfin un tabou qui les a fourvoyés dans une sorte d’autoglorification qui n’a pas résisté au temps.
Cet effort, qui reste jusqu’ici celui des seuls médias – avant Canal +, L’Obs avait publié un numéro spécial esquissant une autre lecture de la colonisation de l’Algérie par la France –, est appelé à s’ancrer rapidement dans le paysage médiatique et politique français réputé trop rigide ou trop pusillanime sur la question. Il restera cependant à l’Etat français, c’est-à-dire au Président actuel et son gouvernement, de faire un effort dans ce sens et d’appréhender la question de la colonisation avec ouverture et un esprit du XXIe siècle. Ce qui est attendu d’eux, c’est de faire des gestes concrets : libérer les archives coloniales, restituer les crânes des résistants de la révolte de Zaâtchas de 1848, accepter l’idée d’une loi algérienne condamnant la colonisation…
S. N.
Comment (7)