La pilule du «vice-»
Par Kamel M. – L’information sur un changement imminent de gouvernement n’autorise qu’une seule lecture possible. Gaïd-Salah n’aura pas décidé de virer son supérieur hiérarchique, Noureddine Bedoui, et ses collègues pour exhausser un vœu cher au mouvement de contestation populaire, mais pour mieux asseoir le système dont il est le parrain.
A cela deux preuves, s’il en est. D’abord, selon les premiers éléments fuités à travers les médias proches du régime, l’ensemble du gouvernement devrait être mis à la porte hormis le ministre de la Justice – qui vient juste d’être nommé – et le général Gaïd-Salah, évidemment. Pour amadouer l’opinion publique très remontée contre lui, le chef d’état-major «rassure» qu’il ne sera pas ministre de la Défense nationale de plein exercice et qu’il n’est, dès lors, motivé par aucune soif de pouvoir. Le vice-ministre n’effacera pas le «vice», assure-t-il via ses supports.
C’est que Gaïd-Salah sait que c’est son statut de chef d’état-major de l’armée qui lui confère son pouvoir. Il sait que tant que la puissance de feu est entre ses mains, il pourra continuer à exécuter «son» plan en toute tranquillité, du moins du côté des institutions croupion. Il n’a que faire du poste de ministre de la Défense. Se hisser lui-même à ce rang ne fera, il en est pleinement conscient, qu’exacerber davantage la colère du peuple qui ne veut plus le voir, ni entendre ses laïus répétitifs et lamentablement vides.
Ensuite, le gouvernement Bedoui sera remplacé par des hommes-liges qui formeront un Exécutif parallèle au panel que les citoyens rejettent tout autant que ceux qui l’ont mis en place pour lui imposer des élections présidentielles «dans les plus brefs délais», afin de court-circuiter toute transition démocratique réelle, telle que revendiquée avec force et résolution par le peuple. Les marionnettes étant légion – les titres risibles du journal gouvernemental El-Moudjahid, qui entend et voit le contraire de ce que le commun des mortels voit et entend chaque mardi et vendredi, est là pour le démontrer –, le pouvoir n’éprouvera aucune difficulté à constituer une nouvelle équipe de pantins sur le dos desquels il assurera sa survie avant de les jeter aux orties à leur tour.
Seulement voilà, ce n’est plus le départ des polichinelles Bensalah et Bedoui que le peuple réclame haut et fort, mais celui du tenace Gaïd-Salah. Aussi un changement de gouvernement serait-il un non-événement et un ballon de baudruche supplémentaire qui éclatera au contact des épines acérées que le peuple a dressées sur le chemin des symboles glus du système Bouteflika.
K. M.
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