Riyad et Paris «interviennent» : le faux discours anti-ingérence du pouvoir
Par Saïd N. – La réaction fébrile de l’ambassade d’Arabie Saoudite en Algérie aux révélations de la presse faisant état d’une intervention de l’ambassadeur de ce pays pour obtenir le remise en liberté du correspondant de la chaîne d’information à capitaux saoudiens Al-Arabiya, arrêté il y a quelques jour pour diffusion de manifestations populaires à Alger montrant des slogans hostiles au chef d’état-major de l’armée, Gaïd-Salah, cache mal un malaise qu’auraient ressenti les diplomates saoudiens en se trouvant ainsi dans l’obligation d’intervenir officiellement dans le débat.
Suspectés par beaucoup d’Algériens d’avoir une main lourde dans la contrerévolution enclenchée en Algérie à l’effet de casser la dynamique populaire née le 22 février dernier contre l’autoritarisme, les Al-Saoud et leurs protégés émiratis avaient su garder, jusque-là, le silence sur l’évolution de la situation en Algérie, en jouant, officiellement, la neutralité et en faisant mine de respecter le principe de non-ingérence dans les affaires internes des autres pays. Mais cette intervention de sa chancellerie à Alger est venue brusquement rappeler son intérêt, en voulant tacitement prouver, à travers cette affaire, l’indépendance politique supposée du pouvoir algérien dans sa manière de faire face à la grave crise à laquelle il est confronté depuis plus de sept mois.
Pris dans le tourbillon de la guerre au Yémen, le régime monarchique saoudien a passé le relais, depuis deux ans, aux Emiratis qui ont, partout, fait montre d’un zèle inouï dans le sabordage des soulèvements populaires qui se propagent dans la région depuis 2011.
Le pouvoir en place à Alger a reçu, durant la même journée de mercredi, une autre gifle, venant cette fois-ci de Paris pour une affaire similaire. Le leader de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a révélé, dans un tweet publié sur son compte, que c’est grâce à une «intervention» du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, que la députée Mathilde Panot, arrêtée la veille à Béjaïa, où elle avait pris part à la marche hebdomadaire des étudiants, a été relâchée et a pu, enfin, regagner la France.
Il venait de démontrer que Paris a toujours son influence sur le pouvoir algérien, quoi qu’en dise le pouvoir dans ses discours officiels, lequel pouvoir ressasse, chaque jour pour la consommation médiatique, des slogans antifrançais en voulant se montrer inflexible devant les «injonctions étrangères».
S. N.
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