Le général Gaïd-Salah à Tebboune : «Je suis encore là et je vous ai à l’œil !»
Par Nabil D. – La déclaration de Gaïd-Salah, qui a complimenté Abdelmadjid Tebboune pour son élection en considérant que c’est «l’homme de la situation», est l’ingérence de trop de l’institution militaire dans les affaires politiques, estiment des sources informées. «Le nouveau Président, bien qu’il ait été élu selon les desiderata du commandement de l’armée qui a imposé sa feuille de route, rejetée par tout un peuple, est désormais le ministre de la Défense et le chef suprême des forces armées. Aussi, le fait qu’il soit félicité solennellement par un vice-ministre et chef de l’armée est une aberration énorme», indiquent ces sources.
«Cette nouvelle intrusion du général Gaïd-Salah, quelques heures à peine après la consécration du successeur de Bouteflika à la tête du pays, cache en son sein, en réalité, un message adressé aussi bien au nouveau locataire d’El-Mouradia qu’au Hirak, à savoir que l’état-major de l’armée est toujours la seule maîtresse du jeu et que le civil Abdelmadjid Tebboune doit se soumettre à son autorité», expliquent nos sources, qui soulignent que «le premier écueil qu’Abdelmadjid Tebboune devra surmonter est la mainmise de l’armée sur les rouages de l’Etat s’il compte vraiment mettre en application son programme dont il n’a pas précisé le contenu car, et cela se comprend, il ne pouvait se faire harakiri avant d’occuper le poste, en révélant d’éventuelles décisions qu’il compterait prendre une fois qu’il aura été légitimé par le Conseil constitutionnel et, surtout, reconnu par les capitales étrangères».
«Dans sa déclaration, Ahmed Gaïd-Salah n’a aucunement laissé entendre qu’il comptait se retirer en dépit de son âge avancé. La guerre de position qui mine le commandement de l’armée et met aux prises un certain nombre de généraux fait que, paradoxalement, sa présence devrait, au contraire – disons – rassurer le nouveau Président, qui n’aura pas la puissance nécessaire pour opérer un grand nettoyage rapidement au sommet de la hiérarchie militaire», indiquent nos sources, qui avertissent que «les jours qui suivront la prise de fonction effective par Abdelmadjid Tebboune seront décisifs pour son mandat». «Les militaires l’ont à l’œil et le moindre faux pas risque de lui coûter son poste», confient ces sources qui soutiennent que le dialogue prôné par Tebboune avec le Hirak sera «difficile, sinon impossible car il n’est pas le détenteur exclusif de la décision».
Pour nos sources, «Tebboune devra d’abord s’affranchir de la tutelle de l’armée en ne cédant pas la fonction de ministre de la Défense de plein exercice à un militaire et en faisant valoir clairement, en tant que président de la République, son statut constitutionnel de patron de l’institution». «Sans cela, il aura les pieds et poings liés et sa présidence serait aussi éphémère que son passage à la tête du gouvernement en 2017», concluent nos sources.
N. D.
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