Le «deal du siècle» : une Trump(erie) sur la marchandise !
Par Aziz Ghedia – Il y a onze ans, j’avais écrit un papier sur le bombardement de Gaza par l’armée du Tsahal. Il n’a jamais été publié. Son titre était «Trop, c’est trop».
Ceci était, en fait, l’exclamation de Bernard Kouchner lors de l’émission «Mots croisés» de la chaîne française F2 consacrée, à l’époque, presqu’exclusivement à la guerre que menait l’Etat hébreu contre la population de Gaza. Et, effectivement, les gens de bonne foi, les gens qui veulent vraiment que la paix s’établisse dans cette partie du monde, quels que soient leur appartenance et leur camp, ne peuvent qu’être d’accord avec cette terrible vérité : l’Etat d’Israël est assuré d’une impunité totale depuis sa création. D’ailleurs, a-t-il respecté, ne serait-ce qu’une seule résolution de l’ONU concernant le problème palestinien ? Pas que je sache !
L’ambassadeur d’Israël en France était visiblement très mal à l’aise lorsque Bernard Kouchner avait insisté sur le fait que s’en était trop ; et il s’était alors lancé à son tour dans des explications et des justifications (à cette agression inqualifiable) mais qui n’avaient, en fait, convaincu personne parmi l’assistance, et encore moins Leila Chahid, la représentante de l’OLP en Europe.
«J’ai peur pour mes enfants qui vivent dans la peur», avait-il dit en substance, oubliant que les enfants palestiniens, eux, ne vivaient pas seulement dans la peur mais mouraient aussi dans le silence complice de la «communauté internationale».
A l’époque, on reprochait au Hamas palestinien de faire entrer clandestinement des armes via des tunnels situés sur la frontière avec l’Egypte. On reprochait aussi à ce parti le fait d’être une organisation terroriste alors que la réalité était tout autre : Hamas a été élu démocratiquement par les Palestiniens. Et si les Palestiniens avaient voté pour ce parti, c’était certainement parce que, à leurs yeux, celui-ci continuait à incarner la résistance. Il était le seul parti dont les dirigeants n’étaient pas corrompus, le seul parti qui prenait en charge leurs doléances sur le plan social.
Alors, pourquoi voulait-on l’éliminer à tout prix ? Pourquoi, sous le prétexte que celui-ci utilisait les habitants de Gaza comme bouclier humain, bombardait-on, sans aucune distinction, toute la population de Gaza ?
Il est temps que l’Etat d’Israël se rende à l’évidence et comprenne qu’en acceptant de discuter et de dialoguer sérieusement même avec son pire ennemi tout deviendra possible. Hamas prône-t-il, dans sa charte, la destruction de l’Etat hébreu ? Qu’à cela ne tienne ! Appelons-le ; associons-le à tout ce qui concerne la question palestinienne et on verra qu’il est, lui aussi, pour la paix ; n’oublions pas qu’il n y’a pas longtemps, le mouvement de résistance palestinien, l’OLP, incarné par son charismatique feu le résident Yasser Arafat, était considéré, lui aussi, comme un mouvement extrémiste, un mouvement terroriste. Mais, de négociation en négociation avec l’Etat d’Israël et de compromis en compromissions (malheureusement), il est devenu ce qu’il est maintenant : un parti presque sans crédibilité et sans emprise réelle sur les évènements en cours. Son successeur, Mahmoud Abbas, a été mille fois mené en bateau, il a fait mille concessions et, au bout du compte, que gagne-t-il ? Il ne faut pas être clerc pour deviner : rien.
Est-ce cela que veut Israël ? Si c’est le cas, le problème restera toujours pendant et cela n’est dans l’intérêt de personne, ni d’aucune partie. L’élimination de Hamas engendrera par la force des choses un autre parti, peut-être beaucoup plus extrémiste encore. N’oublions pas aussi qu’Israël a, d’une manière ou d’une autre, largement contribué à l’émergence de ce parti sur la scène politique palestinienne et cela, évidemment, dans le but de «diviser pour mieux régner». Voilà ce que nous disions il y a onze ans.
Force est d’admettre qu’aujourd’hui les choses ont encore empiré pour le peuple palestinien. Le «deal du siècle» que le président américain, Donald Trump, veut leur imposer n’est que de la poudre aux yeux. Il devrait donc être rejeté par les Palestiniens… et par tous les Etats de la Ligue arabe puisque, dans ce plan, la ville d’El-Qods (qui est le troisième lieu de pèlerinage des musulmans) revient, de facto, à Israël. De plus, cela constitue encore un autre non-respect aux résolutions de l’ONU.
A. G.
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