Tamim à Alger : quel impact de l’affaire Beckers sur les rapports algéro-qataris ?
Par Nabil D. – La visite de l’émir du Qatar coïncide avec l’affaire inédite du renvoi manu militari du directeur général d’Ooredoo, l’Allemand Nicolai Beckers, sur ordre du président de la République. Si le déplacement de l’émir Tamim était programmé de longue date dans le sillage des tractations diplomatiques menées par l’Algérie dans le but d’éviter une escalade militaire en Libye, le cas de l’opérateur de téléphonie mobile appartenant aux Qataris risque de chambouler l’ordre du jour des entretiens qu’aura Abdelmadjid Tebboune avec son hôte.
L’exclusion du directeur général d’Ooredoo n’a étrangement donné lieu à aucun commentaire, ni dans les sphères politiques à Doha ni dans les médias de ce pays. La décision de la plus haute autorité algérienne de «virer» sans ménagement un chef d’entreprise étranger est une première, d’autant que la raison de ce renvoi n’est en rien liée à quelque accusation d’atteinte à la sécurité nationale, comme ce fut le cas de l’Autrichien Hendrik Kasteel dont les agissements suspects sous la houlette de l’intrigant ambassadeur de l’émirat du Qatar à Alger lui avaient valu le refus de renouvellement de son titre de séjour en Algérie.
Cette première expulsion «déguisée» n’avait pas provoqué, non plus, de crise diplomatique entre les deux pays. Conscients sans doute de leur «gaffe», les Qataris ont préféré passer sous silence cet «incident diplomatique» pour éviter qu’il prenne des proportions plus importantes et enveniment les relations, souvent tendues, entre Alger et Doha, l’Algérie ne pardonnant pas au Qatar d’avoir actionné son mastodonte médiatique, la chaîne Al-Jazeera, pour soutenir les extrémistes religieux du FIS et leur bras armé dans les années 1990 et d’avoir voulu exporter le «printemps arabe» dans le pays en 2011.
C’est un émir du Qatar fragilisé par son conflit avec ses frères ennemis du Golfe, les Emirats arabes unis et l’Arabie Saoudite, qui se rend en Algérie pour tenter de convaincre ses interlocuteurs algériens de se rapprocher de l’axe Turquie-Qatar contre ses rivaux avec lesquels il est en «guerre» à nos frontières. L’affaire Ooredoo peut, dès lors, paraître insignifiante comparée aux enjeux autrement plus stratégiques que revêt le dossier libyen.
Des observateurs avaient estimé qu’au moins deux raisons possibles pouvaient expliquer le silence des autorités qataries au sujet de l’expulsion du numéro un d’Ooredoo Algérie. «Il se peut que les autorités qataries aient préféré ne pas amplifier la crise et éviter d’entrer dans une confrontation avec l’Algérie dans ce contexte difficile marqué par une guerre de positionnement dans la région», avaient-ils fait remarquer.
D’autres sources ne sont pas de cet avis et «flairent» dans cette absence de réaction des très arrogants Al-Thani une riposte qui serait en préparation. La visite de Tamim éclairera-t-elle notre lanterne ?
N. D.
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