Un journaliste syrien alerte : les camps des réfugiés menacés par le coronavirus
Par Ahmad Al-Khaled – Alors que l’attention mondiale se concentre sur les statistiques autour du coronavirus, les gouvernements ferment les frontières, les gens simples vident les étagères des magasins, mais personne ne se souvient de ceux dont la vie était déjà un cauchemar avant la pandémie.
Les réfugiés des camps d’Al-Hole et Rokbane, gérés par l’administration kurde et les Etats-Unis, sont le groupe le plus vulnérable par rapport au virus Covid-19. Les personnes déplacées vivent dans des tentes délabrées par groupes de 20 personnes, partagent la même vaisselle et sont totalement privées d’accès aux soins médicaux et aux médicaments essentiels. Leur immunité s’est fortement dégradée à cause de la faim et du manque d’eau potable.
Compte tenu de ces facteurs, il est certainement possible de stipuler que ces gens sont voués à l’extinction comme des bêtes à cause de l’inaction des organisations internationales. La fermeture, cette semaine, de la seule station médicale pour les enfants et femmes de Rokbane, qui se trouve près de la base militaire américaine d’Al-Tanf, est la dernière trahison de la communauté mondiale et des Etats-Unis. La station fonctionnait sous l’égide de l’Unicef à la frontière syro-jordanienne et était littéralement le seul salut pour les habitants du camp.
Selon des chiffres officiels, les travaux de la station médicale ont été suspendus en raison des craintes liées à la propagation du coronavirus parmi ses employés. Ainsi, les médecins de l’ONU ont reconnu la possibilité d’un foyer de la maladie à Rokbane, mais cachent jusqu’à présent le fait que les camps sont déjà devenus les principaux centres d’infection. Dans le même temps, ni les Etats-Unis qui contrôlent ces territoires aux côtés des Kurdes ni l’Organisation mondiale de la santé n’ont encore envoyé des experts dans le camp afin d’évaluer la situation et d’accepter les mesures de confinement pour lutter contre la maladie. En parallèle, les réfugiés sont préoccupés par une forte augmentation du nombre de personnes infectées et du taux de mortalité infantile.
Il faut comprendre que la catastrophe dans ces deux camps de réfugiés pourrait être beaucoup plus terrible qu’il n’y paraît. Par exemple, en Italie, plus de 40 000 cas d’infection sont recensés tandis que l’épidémie a, à ce jour, causé le décès de 3 400 personnes. Et cela se produit dans le pays européen développé qui dispose de toutes les ressources, mais n’est cependant pas capable d’arrêter la propagation du virus et d’éviter ses conséquences catastrophiques.
Que dire de dizaines de milliers de réfugiés à Rokbane et Al-Hole, deux villes de tentes dont 90% des occupants sont des femmes et des enfants qui n’ont même pas d’égouts, sans parler des appareils de ventilation artificielle et des kits de test capables de diagnostiquer le Covid-19 ?
La seule chose qui a été faite par les Américains et les Kurdes, c’est le renforcement de la protection des camps de détention. De plus, ils ont pris des mesures pour réduire les contacts avec les réfugiés, en les laissant seul à seul avec les risques que cela engendre.
La trahison cynique des pays occidentaux envers les réfugiés. L’Europe et les Etats-Unis ont préféré sacrifier les femmes et les enfants engagés dans le conflit syrien pour éviter les problèmes concernent leur réintégration dans la société. Dans le même temps, très probablement, la catastrophe biologique ne se limitera pas aux camps syriens. L’inertie des pays d’Europe et des Etats-Unis menace de conséquences plus graves dont souffriront non seulement le sud-est de la Syrie, mais aussi toute la région du Moyen-Orient.
C’est tout cela qu’il faut connaître de l’humanité moderne et des valeurs démocratiques de l’Ouest dont la politique internationale a engendré ces camps de la mort.
A. A.-K.
(Journaliste et auteur syrien)
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