Impuissance
Par Mrizek Sahraoui – Les élections présidentielles américaines, prévues le 3 novembre prochain, et la course à l’investiture démocrate en cours sont totalement chamboulées par la crise sanitaire mondiale due au coronavirus, Covid-19. Les deux campagnes électorales sont quasiment à l’arrêt, revenues presque à la case de départ. Rien de plus normal. Faute d’avoir pris au sérieux le virus, l’Amérique est désormais l’épicentre de la pandémie où l’on enregistre le plus de morts et de personnes contaminées en comparaison avec les pays les plus touchés, l’Italie, l’Espagne, la France et la Chine, le pays d’où est parti le virus.
La barre des 10 000 morts et de 350 000 personnes contaminées, selon l’université Johns-Hopkins, vient d’être franchie, une situation dramatique aggravée par un système de santé très complexe, basé essentiellement sur des assurances privées. Près de 15% des citoyens américains ne disposent d’aucune assurance. Une situation là encore qui fait craindre le pire à la suite de cette pandémie.
Donald Trump qui, fin mars, se moquait du «virus chinois», une insinuation qui avait suscité l’ire des autorités chinoises, a parlé, dimanche dernier, d’«une période qui va être vraiment horrible», avec «de très mauvais chiffres». Moins de deux semaines auparavant, il avait tweeté : «Nous ne pouvons pas laisser le remède être pire que le problème lui-même», traduire l’économie doit primer sur les vies humaines.
Avec 1 217 délégués contre 914 pour Bernie Sanders qui refuse de jeter l’éponge malgré des projections qui lui sont largement défavorables, Joe Biden fait figure de favori. Mais avec cette pandémie et le report au mois de juin des primaires, qui devaient normalement se tenir en mars et avril, excepté le scrutin du Wisconsin où le vote est maintenu pour mardi prochain, l’ancien vice-président de Barack Obama est inaudible car privé de sorties publiques et de meetings depuis que l’Amérique subit de plein fouet le virus. Et c’est Donald Trump qui, avec sa jactance habituelle, occupe totalement l’espace médiatique, par le biais des briefings quotidiens de plus de deux heures.
Si la course à l’investiture démocrate semble gagnée et devrait être remportée par Joe Biden, l’issue de la présidentielle, elle, est plus que jamais incertaine, lors même que les sondages sont favorables à l’ancien vice-président, le plaçant en tête pour l’élection présidentielle du 3 novembre avec 49,9% des intentions de vote contre 44% pour Donald Trump.
Joe Biden pourrait, en effet, tirer profit de la situation dramatique que traverse l’Amérique. Le Covid-19 a fait chuter les cours du pétrole, avec comme corollaire les probables faillites en série des sociétés exploitant le gaz de schiste. Les marchés boursiers ont dévissé, une dégringolade observée pour la dernière fois lors du «lundi noir» du 19 octobre 1987, et le chômage, le mantra sur lequel le Président sortant comptait baser sa campagne, a littéralement explosé. Et c’est le «Keep america great», le nouveau slogan de Donald Trump pour briguer un second mandat à la tête des Etats-Unis, dont le rang de première puissance mondiale devrait lui échapper une fois la crise terminée, qui perd tout son sens et devient caduc.
La pandémie du Covid-19 a révélé au grand jour l’impuissance des Etats-Unis à faire face à la pandémie et l’impéritie du président Trump dont les coups de menton n’auront pas empêché l’hécatombe.
Si seulement le 3 novembre prochain, les électeurs américains venaient à s’en souvenir.
M. S.
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