Les non-croyants n’ont pas à se plier au diktat des croyants
Par Youcef Benzatat – La croyance en Dieu ne peut se décréter par la Constitution, comme c’est le cas dans son article 2 : «L’islam est la religion de l’Etat». Etre Algérien présuppose donc que l’on soit croyant musulman. Or, beaucoup d’Algériens ne sont pas croyants. Il est évident que cette prescription n’a aucun effet sur la croyance ou non d’un individu. La croyance ou non étant une affaire personnelle qui ne relève que de l’intime. C’est plutôt dans l’affirmation de sa non-croyance explicite dans l’espace public que cette contrainte est discriminatoire contre le non-croyant. Particulièrement pendant le mois de Ramadhan, où le non-croyant se voit obligé de se cacher pour se nourrir et les restaurants de fermer pendant le jour.
L’espace public ne doit pas être le monopole des croyants. Les non-croyants ont eux aussi un droit sur cet espace public. Ils devraient normalement déjeuner sans avoir de compte à rendre à quiconque et les restaurants d’ouvrir et de servir librement tout citoyen qui voudrait déjeuner. C’est aussi valable pour les cafés et pour toute autre manifestation publique qui tombe sous cette contrainte. On n’a pas à se soumettre au dictat des croyants. Tout Algérien et toute Algérienne ont le droit d’affirmer publiquement leur non-croyance dans un esprit de tolérance réciproque. Les croyants qui s’opposent à ce que les non-croyants puissent affirmer librement leur non-croyance dans l’espace public sont intolérants et irrespectueux de la liberté de conscience. Ils sont amenés à s’émanciper de leur intolérance et de leur intégrisme religieux. Car ce sont tous les croyants qui s’opposent à la liberté d’expression et de conscience des non-croyants qui sont intolérants et intégristes.
La lutte du Hirak contre la dictature militaire n’aura de sens que lorsqu’il intègre dans son combat la lutte contre l’intégrisme religieux. Lutter contre la dictature militaire, c’est lutter contre toutes les dictatures, celle de l’argent, du néocolonialisme, de la religion, sans oublier celle de l’identité qui voudrait imposer un particularisme ethnique à toute la société, multiethnique, métissée et transculturelle.
Y. B.
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