Idir : le résistant qui défendait tamazight «envers et contre tous» nous quitte
Par Kamel M. – Le chanteur d’expression amazighe Idir est décédé ce samedi soir, à l’hôpital Bichat, à Paris, des suites d’une longue maladie. Avec le décès d’Idir, de son vrai nom Hamid Cheriet, c’est un monument de la musique moderne et engagée que l’Algérie perd. Une rumeur sur sa mort avait circulé le 29 septembre 2019, rumeur démentie en son temps à travers sa page Facebook. Le chanteur était malade depuis quelque temps, affirmaient des sources concordantes. «Idir se porte très bien, ne croyez pas les rumeurs infondées et malintentionnées !» avait écrit l’administrateur de la page pour rassurer les fans de l’artiste très inquiets par l’annonce qui avait fait le tour de la Toile.
Plus qu’un chanteur, Idir est considéré comme une icône du combat pour l’identité et la culture amazighes. Installé en France depuis le milieu des années 1970, l’auteur de la légendaire Avava Inouva ne s’est plus produit dans son pays jusqu’en 2018. Après un concert qui a drainé des milliers de spectateurs à la Coupole d’Alger, le 5 janvier 2018, Idir avait programmé une douzaine d’autres galas à travers les principales villes du pays, mais cet agenda ne sera jamais appliqué.
Après son retour en France, il fera une brève réapparition lors d’un gala animé à Paris par une pléiade d’artistes. Il était monté sur scène arborant le drapeau amazigh, en signe de soutien aux manifestants pacifiques persécutés par le pouvoir qui avait interdit, sur injonction de l’ancien chef d’état-major de l’armée, le port de l’emblème identitaire dans les marches.
Le 18 avril 2018, le chantre de la chanson kabyle avait répondu, dans un entretien à Algeriepatriotique, à certaines voix qui lui avaient reproché «la façon avec laquelle il a annoncé son retour au pays», en rappelant qu’il était, avant tout, un Algérien : «Est-ce un crime pour un Algérien de revenir dans son pays ?» s’était-il interrogé.
Prié de donner son avis sur les divergences qui marquent le débat sur la transcription de tamazight, Idir avait souligné qu’«il n’y a pas que ça qui envenime le débat», estimant que «tout est sujet à des polémiques stériles qui ne veulent rien dire». «Moi, je me suis dit que tant que mon identité et ma langue ne sont pas officielles, je ne viens pas», avait-il dit, expliquant qu’il avait «tenu parole». «Le jour où la langue amazighe a été officialisée, je suis venu. Pour moi, c’est tout ce qu’il y a», avait-il encore dit.
Idir se démarquait des mouvements politiques quels qu’ils soient, clamant son indépendance dans le combat qu’il menait pour tamazight. «Je ne fais pas de politique. C’est moi que ça concerne. Tamazight, pour moi, est quelque chose d’inaliénable et je continuerai toujours à la défendre envers et contre tous. Néanmoins, je ne m’intéresse pas aux gens qui veulent politiser certaines choses», avait-il assuré, en affirmant que l’éventualité de chanter en arabe «ne pose aucun problème» pour lui.
K. M.
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