Quand un média français brise le tabou des massacres d’Algériens le 8 mai 1945
Par Mohamed K. – L’Obs est revenu sur les massacres commis par la France coloniale en Algérie au moment où le monde fêtait la fin de la Seconde Guerre mondiale. «Les massacres de Sétif en Algérie, un long déni français», titre le magazine français qui écrit : «Le jour de la capitulation de l’Allemagne, le 8 mai 1945, une manifestation de musulmans dégénère dans le Constantinois. La répression est terrible. La presse minimise les massacres. Et jusqu’à ce que la guerre éclate neuf ans plus tard, elle refusera de voir l’ampleur du mouvement nationaliste.»
«C’est un jour de fête, la France et ses colonies célèbrent la victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie. La première Armée française, qui a participé au débarquement de Provence et à la libération de la France, est composée à 90% de soldats venus d’Afrique du Nord. Les Algériens ont, eux aussi, obtenu le droit de fêter ce 8 mai 1945 et de descendre dans la rue. A la condition − formelle − de ne pas exhiber de panneaux, de ne pas entonner de chants, de ne pas arborer le moindre signe nationaliste», rappelle le média français.
«Mais, ce jour-là, à Sétif, dans le Constantinois, des fanions sont agités, des libérez Messali Hadj, du nom du leader nationaliste emprisonné à Brazzaville, sont criés. Un clairon scout musulman de 26 ans, Saâl Bouzid, brandit le drapeau qui allait devenir celui de l’Algérie indépendante – blanc et vert avec croissant et étoile rouges. En quelques minutes, la manifestation tourne au cauchemar», souligne L’Obs, qui note que «l’enchaînement des faits reste encore confus soixante-quinze ans après». «Un gendarme tire sur le jeune scout et le tue. Cinq autres manifestants algériens sont blessés. Le cortège se transforme en émeute», se remémore l’hebdomadaire fondé par Jean Daniel et Claude Perdriel, deux années après l’indépendance de l’Algérie.
La question de la repentance et de la reconnaissance des crimes commis par la France coloniale en Algérie continue d’alimenter la polémique et empêche l’ancienne puissance coloniale et son ancienne colonie de tourner la page sanglante de 132 longues années d’occupation, de spoliation, d’aliénation et de génocides. Emmanuel Macron a tenté une percée, en affirmant que le «colonialisme a été une erreur profonde, une faute de la République» et, joignant le geste à la parole, il a décidé, d’un commun accord avec le président Tebboune, de mettre en place une commission mixte sur la Guerre d’Algérie, coprésidée par les historiens Benjamin Stora et Abdelmadjid Chikhi. Un effort de réécriture de l’histoire commune des deux pays qui a donné lieu à une réaction hostile des nostalgiques de l’Algérie française.
M. K.
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