Hafiz dévie la visite de l’ambassadeur d’Algérie à la Grande Mosquée de Paris
Par Mohamed K. – «L’ambassadeur d’Algérie à Paris ne s’est pas rendu à la Grande Mosquée de Paris pour soutenir ou, encore moins, adouber son recteur dont l’élection truquée est à ce jour contestée», ont affirmé des sources présentes au déjeuner que Chems-Eddine Hafiz a organisé en l’honneur du successeur de Salah Lebdioui, qui vient de prendre ses fonctions au 50, rue de Lisbonne. «Son déplacement dans ce lieu de culte convoité par les Marocains et les Turcs ne souffre aucune ambiguïté : il vise à confirmer que cet édifice religieux bâti dans les années 1920 a toujours été et sera ad vitam æternam sous la férule de l’Algérie qui mobilise des ressources financières conséquentes pour sa gestion», ont expliqué nos sources.
Or, le successeur de Dalil Boubakeur ne comptait assurément pas laisser passer cette aubaine pour récupérer la visite d’Antar Daoud et d’en détourner l’objet, en faisant insidieusement accroire à un appui des autorités algériennes au couple Hafiz-Louanoughi, alors qu’il n’en est rien. «Le directeur de l’administration, véritable décideur au sein de la Grande Mosquée, a carrément été empêché d’assister à la réunion entre l’ambassadeur est ses hôtes», indiquent, en effet, nos sources, selon lesquelles le diplomate s’est montré «très ferme» dans son discours. Lors de sa visite à Alger, Chems-Eddine Hafiz avait laissé entendre qu’il avait été reçu par le président fraîchement élu, Abdelmadjid Tebboune, mais des sources informées avaient révélé que le recteur «putschiste» avait, en réalité, été convoqué par le secrétaire général de la Présidence «pour se faire sonner les cloches».
Loin d’avoir été découragé, Chems-Eddine Hafiz et son bras droit, Mohamed Louanoughi, ont opté pour une offensive médiatique, le recteur multipliant les interviews – payantes, selon des indiscrétions – dans les médias algériens et français, le recteur de la Grande Mosquée de Paris adoptant deux langages différents, l’un emprunté au lobby sioniste en France en direction des autorités françaises, l’autre sous forme de clin d’œil à Alger pour que le gouvernement débloque les subventions. D’ailleurs, d’après toujours nos sources, Hafiz aurait sollicité de son interlocuteur, ce mardi, que celle-ci soit augmentée pour, a-t-il argué, pouvoir faire face aux dépenses, sachant que le recteur et son adjoint se sont fixé un salaire mirobolant, se sont octroyé un pouvoir discrétionnaire sur la gestion des dons consentis par les fidèles et ont fait de la société de certification de la viande halal une affaire de famille.
Algeriepatriotique avait appris, en août dernier, que les dépassements constatés à la Grande Mosquée de Paris avaient poussé les autorités algériennes à geler les financements destinés à cette très lucrative institution cultuelle. Le ministère des Affaires étrangères algérien débourse deux millions d’euros de subvention chaque année, tandis que le ministère des Affaires religieuses couvre les salaires et autres frais des imams détachés à Paris, soit une cagnotte de 4,7 millions d’euros. Une coquette somme à laquelle s’ajoutent d’autres revenus à partir d’activités commerciales – location du fonds de commerce du restaurant attenant à la mosquée, bain maure, pèlerinage à La Mecque, etc.
D’après des sources proches du dossier, il n’est pas sûr que le gouvernement algérien mette l’argent à la disposition de la nouvelle équipe dirigeante de la Grande Mosquée de Paris, tant qu’elle sera en place. Les autorités politiques et sécuritaires algériennes ont clairement fait savoir à Chems-Eddine Hafiz et à son adjoint Mohamed Louanoughi, dès le lendemain de leur «coup d’Etat scientifique», qu’elles ne comptaient pas fermer les yeux sur une telle offense à l’Etat algérien qui avait pris la décision de faire remplacer Dalil Boubakeur par une des deux sommités intellectuelles émérites que sont Mustapha Chérif ou Ghaleb Bencheikh.
«La visite de l’ambassadeur d’Algérie, que Hafiz tente d’instrumentaliser, n’avait pas pour vocation de cautionner le binôme, mais de lui faire savoir que l’Etat algérien les a à l’œil», insistent nos sources qui attirent l’attention sur l’absence d’une photo de famille officielle, tel que cela est d’usage en pareilles circonstances.
M. K.
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