Représailles après l’annulation de la visite de Castex : Le Figaro ouvre le bal !
Par Abdelkader S. – Le Figaro publie un article réchauffé sur les moines de Tibhirine en s’appuyant sur une source à tout le moins farfelue. Le grand journal parisien, qui ressort la vieille rengaine du «qui tue qui», comme par hasard au lendemain de l’annulation par Alger de la visite de Jean Castex, se réfère aux propos de l’ancien officier du DRS réfugié à Londres Karim Moulay, connu pour sa proximité avec les milieux islamistes et le mouvement Rachad.
«Moines de Tibhirine : la version étayée d’un ex-agent des services algériens ébranle la piste islamiste», lit-on dans le titre d’un article qui n’apporte absolument rien de nouveau, sinon le «témoignage» d’un félon qui abonde dans le même sens que son alter ego de Paris, Habib Souaïdia, chouchou de François Gèze. «Vingt-cinq ans après l’assassinat des sept religieux français, Le Figaro dévoile le récit détaillé d’un ancien agent qui accable les services secrets algériens», se vante le quotidien qui rajoute une couche : «La thèse d’une manipulation, étayée par des rapports d’expertises, se renforce.»
Que nous apprend donc le journal français de droite que nous ne sachions déjà ? «Vingt-cinq ans après la tragédie, les zones d’ombre peinent à se dissiper dans l’enquête hors norme sur l’assassinat des sept moines de Tibhirine, enlevés dans leur monastère dans la nuit du 26 au 27 mars 1996 alors que le pays était en proie à la guerre civile.» Et d’entrer dans le vif du sujet : «Bien que la version officielle désigne le Groupe islamique armé (GIA), la thèse d’une manipulation des autorités algériennes s’est trouvée confortée par les conclusions d’autopsies effectuées sur les têtes des religieux ainsi que par de troublantes incohérences de calendrier.» Jusque-là, Le Figaro paraît être en retard d’une guerre, puisque toutes ces allégations fallacieuses ont été servies en entrée, en plat de résistance et en dessert dans la cuisine des artisans du «qui tue qui» dans laquelle trône le chef de La Découverte qui a juré qu’il ne lâcherait sa proie que lorsqu’il mangera les pissenlits par la racine.
Puis, suit un rappel : «Entre espoirs et déconvenues, les familles des victimes cherchent toujours à faire la lumière, ballottées d’une expertise à l’autre, d’un témoignage à l’autre.» Et un commentaire allusif : «Une pierre, jusqu’ici partiellement enfouie dans la procédure, pourrait bien achever de fragiliser la piste d’un attentat islamiste.» La pierre ? C’est un récit «venant du cœur même des services secrets algériens de l’époque». Quel est-il ? Karim Moulay. Problème : cet ancien agent secret algérien «qui dit avoir travaillé entre 1987 et 2001 pour l’ex-Direction du renseignement et de la sécurité» ne sait-il pas que le DRS est un département et non pas une direction ? Voilà donc Le Figaro informé que son informateur est mal informé sur le nom même de son ancien employeur.
Les 91% de l’article du Figaro étant réservés à ses abonnés, les 9% accessibles au grand public sont largement suffisants pour démonter les élucubrations du journal français épinglé, déjà en avril 2019, par un ex-officier du renseignement français qui dévoilait une intox du même canard sur l’Algérie. Alain Rodier avait démontré, en effet, dans une analyse sur une information «révélée» par le même Figaro, que ce quotidien français est un habitué de la désinformation. L’ancien officier supérieur au sein des services de renseignements français avait expliqué que le «scoop» sur une supposée déclaration faite par «les services de renseignements russes à leurs homologues français» sur les événements en Algérie était improbable.
Selon Le Figaro, qui se référait à un «diplomate», les responsables de l’ex-KGB auraient attiré l’attention de la DGSE sur leur refus de «toute ingérence française dans le choix du nouveau régime algérien». Or, expliquait Alain Rodier, qui se défendait d’être russophobe «comme cela est actuellement de bon ton à Paris», ironisait-il, «cette affaire sent à plein nez l’intoxication».
L’ancien officier du renseignement français s’interrogeait, à juste titre : «A qui profite le crime ?» avant de suspecter les auteurs de cette «fuite» de chercher à «nourrir des polémiques dont sont avides les médias, question d’audience et de ventes en kiosques». Sauf que dans cette nouvelle intrigue, c’est clairement de représailles qu’il s’agit.
A. S.
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