Quand un ex-ministre de Kadhafi sert de cache-misère au régime du Makhzen
Par Kamel M. – Même un scribouillard zélé du Makhzen ne se serait pas fendu d’un article aussi flagorneur à l’égard de Mohammed VI et de son régime autocratique de plus en plus décrié par les Marocains. Son auteur : Abdel Rahman Shalgham, ancien ministre des Affaires étrangères de Mouammar Kadhafi qui brosse un tableau idyllique de la situation politique et économique au Maroc, un pays qui, affirme-t-il, «a connu ces dernières années une grande activité économique».
Le dissident libyen qui avait applaudi le renversement du régime de Kadhafi à partir de New York, donnant ainsi son quitus à l’assassinat de l’ancien «guide de la révolution», énumère des chiffres censés appuyer son analyse rédigée sous une forme qui confine au publireportage rémunéré. Selon lui, le Maroc est en train de devenir un «tigre africain pionnier au regard des capacités matérielles et des ressources humaines qualifiées dont il dispose». Shalgham parle sans doute des millions de travailleurs marocains que se «partagent» les quelques privilégiés qui orbitent autour du palais et des multinationales qui ont choisi d’installer des filières dans ce pays considéré comme le Bangladesh du Maghreb.
Le bourgeois libyen ajoute que la «formation politique de l’Etat constitue la force qui représente le moteur vers les objectifs nationaux» (sic). Par ailleurs, poursuit-il, «le royaume du Maroc est devenu aujourd’hui un Etat constitutionnel parlementaire […] atteignant ainsi l’âge de la majorité démocratique dans lequel sont consacrées les règles de l’alternance dans la gestion de l’Etat à travers des élections législatives, faisant que le gouvernement devient un conseil d’administration de l’Etat et œuvre à la réalisation des aspirations de l’électeur». Shalgham cautionne ainsi la fraude dénoncée par les Marocains eux-mêmes qui dénoncent la mainmise flagrante des néolibéraux proches du palais sur le Parlement, ces mêmes Marocains qui s’interrogent sur l’utilité de telles élections à partir du moment où le roi, objectent-ils, détient toutes les prérogatives.
L’ancien diplomate persiste et signe : «Le Maroc a réussi des étapes d’examens réels dans son chemin vers la démocratie.» Et de brosser dans le sens du poil : «Le roi Mohammed VI est l’architecte qui a posé les jalons sur le parcours à travers la Constitution.» Il ajoute un autre mensonge éhonté : «Le peuple a agi avec une conscience objective qui a dépassé le régionalisme et le sectarisme et les jeunes des deux sexes ont été les plus attachés à la participation à cette fête démocratique au sujet duquel les observateurs locaux et étrangers ont été unanimes à en saluer l’honnêteté.»
Qu’est-ce qui fait courir ce retraité libyen ? A quoi lui sert-il de débiter des balivernes sur un pays qui est à deux doigts d’une implosion sociale sans précédent ? Qui peut-il croire de telles contre-vérités lorsque les réseaux sociaux foisonnent de vidéos de Marocains qui menacent de se réfugier en Algérie pour fuir la faim et la répression ?
K. M.
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