Crise libyenne : pourquoi le bras de fer entre Dbeibah et Aguila touche l’Algérie
Par Nabil D. – L’Algérie suit de très près l’évolution de la situation politique et sécuritaire dans la Libye voisine dont les responsables se sont réunis récemment à Alger pour une énième tentative d’aboutir à une solution pérenne au conflit qui a dévasté le pays depuis la chute du régime de Kadhafi, en 2011. L’Egypte, de son côté, s’est empressée de renvoyer les quelque deux millions de travailleurs qui avaient dû fuir la Libye à cause de la guerre civile. La crise du Nil et la situation économique intenable aidant, le gouvernement égyptien avait besoin de cette bouée de sauvetage, quitte à faire prendre des risques à ses ressortissants. Alger et Le Caire comptent bien reprendre leur place en Libye où le groupe pétrolier national Sonatrach compte de nombreuses exploitations sur place.
Selon des sources sûres, la dernière empoignade qui a mis aux prises le Premier ministre et le Parlement a pour origine une offre égyptienne à leur homme-lige, l’homme fort de l’Est, qui saborde toutes les tentatives de dialogue aux fins d’aboutir à un processus de paix pérenne et solide. Nos sources indiquent, en effet, que lors de son entretien avec les Egyptiens, au Caire, la délégation d’Abdelhamid Dbeibah a enregistré et diffusé une partie des entretiens relative au paiement de plus d’un milliard de dollars à Khalifa Haftar pour qu’il accepte l’unification de l’armée. Ce même Khalifa Haftar qui ne cache pas son animosité à l’égard de l’Algérie qu’il a menacée plus d’une fois.
Les Egyptiens et leur relais Aguila Saleh ont très mal pris cette divulgation du contenu des discussions et se sont vengés à leur manière, apprend-on auprès de nos sources, qui précisent cependant que le Gouvernement d’union dirigé par le successeur de Fayez Al-Sarraj demeure le gouvernement légitime reconnu par le Conseil de sécurité de l’ONU et, donc, la communauté internationale. Mais ce bras de fer va, toutefois, contribuer à prolonger la situation de confusion et entraîner le report des élections prévues le 24 décembre prochain.
Pour rappel, le Parlement libyen avait voté, mardi dernier, une motion de censure contre le gouvernement du Premier ministre Abdelhamid Dbeibah. Une démarche accueillie «avec inquiétude» par la Mission d’appui des Nations unies en Libye (Manul) qui tient à ce que l’échéance du 24 décembre demeure «l’objectif primordial». Le vote a eu lieu au cours d’une séance à huis clos en présence du président du Parlement Aguila Saleh, allié de Haftar. Le Premier ministre avait réagi en réaffirmant sa «détermination» à poursuivre ce qu’il a «commencé», avant de prendre un bain de foule en plein cœur de Tripoli, en guise de défi au Parlement dont il ne reconnaît pas la légitimité de la décision prise à son encontre.
Il apparaît clairement que, derrière cette crise aux allures de politique intérieure, se cachent des désaccords profonds entre les deux pays voisins influents de la Libye que sont l’Algérie et l’Egypte.
N. D.
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