Patrick Mennucci : «Une gêne pèse sur la relation entre l’Algérie et la France»
Par Houari A. – Patrick Mennucci a estimé que les enjeux qui sous-tendent les rapports entre l’Algérie et la France «sont connus». «Dans les milieux politiques, on sait l’importance dans la relation Pais-Alger. Là, je ne parle pas que d’une relation diplomatique, je parle d’une relation économique, humaine, etc. Je pense que tout le monde le comprend», a-t-il expliqué, en prenant le soin de bien peser ses mots en répondant aux questions de Berbère TV. «Le problème, a ajouté l’ancien député français ami de l’Algérie, c’est que cette relation se heurte toujours, à Alger comme à Paris, même si je ne les mets pas sur le même plan idéologique, sur des individus et des groupes pour qui il y a une facilité, quand il y a un problème, à désigner le responsable».
«Très souvent, à Alger, quand quelque chose ne va pas, on dit que c’est la France qui manipule, et vous voyez bien ce que fait l’extrême-droite ici [en France]. Donc, il y a une espèce de gêne qui pèse lourdement à la fois sur la politique algérienne et la politique française. C’est cette question-là qu’il faut régler», a-t-il poursuivi, en s’interrogeant : «Est-ce que cette question peut se régler avec le temps, c’est-à-dire avec la disparition de ceux qui étaient au FLN et de ceux qui ont fait la guerre d’Algérie, l’OAS, les pieds-noirs qui sont, comme moi, dont la famille est arrivée il y a 150 ans en France ?» «Je pense que tous les actes qui sont faits par l’Etat français en lien avec l’Etat algérien, même si ça paraît petit, ont de l’importance, notamment toutes les questions mémorielles qui ont très peu de valeur économique mais une immense valeur humaine, intellectuelle, et qui pèsent lourd sur les questions économiques», a encore dit l’ancien conseiller municipal à Marseille.
Dans un entretien à Algeriepatriotique, Patrick Mennucci avait appelé la France à «assumer son passé». Pour lui, le travail de mémoire entamé par François Hollande, qui a reconnu la responsabilité de la France dans les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata du 8 Mai 1945 et assumé que l’Etat français était responsable des massacres du 17 Octobre 1961 à Paris «a permis de débloquer le dialogue entre les deux pays sur des bases constructives et de relancer la coopération bilatérale» qui s’est traduite notamment par la mise en place de la grande commission France-Algérie «au sein de laquelle de grands dossiers économiques ont pu trouver leur aboutissement».
L’ancien élu socialiste de la Cité phocéenne a, pour rappel, déposé, durant sa députation, une proposition de loi portant reconnaissance de la responsabilité de la France dans les massacres du 17 Octobre 1961. «Je ne parlerai pas de repentance car ce terme est plus du registre spirituel que politique et n’apporte rien de plus au débat. Ma démarche consiste, dans le chemin tracé par François Hollande, à assumer le passé avec courage et lucidité afin de construire une relation forte pour l’avenir, dans le cadre d’un partenariat égalitaire et mutuellement profitable», avait-il indiqué dans l’interview qu’il avait accordée à notre site en 2016.
«Je crois que la France a un problème spécifique lié aux conditions douloureuses, parfois dramatiques, dans lesquelles s’est déroulé le processus de décolonisation, en particulier en Algérie», avait-il soutenu, en affirmant qu’il ne sous-estimait pas «non plus le poids des groupes de pression» qui empêchent tout rapprochement entre les deux pays, comme cela avait été souligné, il y a quelques mois, par l’actuel ambassadeur d’Algérie à Paris. «La France subit, comme malheureusement l’ensemble du monde, une vague réactionnaire sans précédent, ce qui rend l’opinion publique plus rétive à un discours de vérité sur la mémoire», avait fait remarquer Patrick Mennucci, selon lequel «la seule attitude responsable consiste à assumer le passé afin de dégager la voie pour le présent et l’avenir».
H. A.
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