La mémoire, un devoir

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La commémoration est un devoir de mémoire. D. R.

Par Nouredine Benferhat – La mémoire collective est un élément essentiel de l’identité nationale, elle est liée à la construction nationale. Elle est le pivot central de l’existence sociale et la seule manière de faire triompher l’esprit sur le néant et, par-là, d’établir la chaîne des générations. Elle participe de la construction de l’identité sociale. «La mémoire ne cherche à sauver le passé que pour servir au présent et à l’avenir.»

Nous assistons depuis quelques années à une multiplication des mémoires – régionales, religieuses –et à une multiplication des témoignages, les témoins cherchant à légitimer leur propre vision du passé sans être soumise à la critique classique du témoignage.

Il devient essentiel de se réapproprier la mémoire pour réduire le défi qui se pose à la nation par les fidélités et les mémoires particulières, qu’elles soient claniques ou religieuses. Il s’agit, en effet, de transcender la pluralité des mémoires et particulièrement la mémoire religieuse telle que véhiculée par un charlatanisme importé, loin de nos pratiques traditionnelles, porteuse de tous les dangers et qui, par ailleurs, n’admet aucune autre mémoire. Mais, aussi, déterminer la matrice constitutive de l’espace politique national dans une vision de l’Algérie.

Le rôle de l’historien dans cette construction est essentiel ; il est seul à pouvoir analyser la façon dont le passé n’a pas réussi à se cristalliser dans le présent. Dans cette fonction critique, il allie une fonction civique et éthique dans une dialectique passé/présent, le passé servant à éclairer l’action à entreprendre pour sa mission de construction de la mémoire historique et sa participation à la construction de la mémoire collective.

Le devoir de mémoire est un impératif catégorique. On ne peut parler de la construction de la mémoire collective sans la lier à l’importance de la commémoration. Celle-ci est un moyen de transmission d’un patrimoine qui implique l’idée de quelque chose qui nous a été transmis par ceux qui nous ont précédés. La commémoration, c’est une reconstruction à partir du passé à travers les lieux qui sont constitués des symboles les plus divers de la mémoire collective nationale et des périodes qui ont fondé la mémoire nationale.

Commémorer, c’est mettre en exergue les symboles, à la fois dans des manifestations, mais aussi dans les objets de vénération où s’incarnent la mémoire nationale et son lien avec les hommes du passé. Cela consiste en la célébration des grands événements historiques, en hommage aux personnages historiques et aux grands hommes de la culture et du savoir, en pérennisant les journées du souvenir matériels et immatériels pour incarner la mémoire nationale.

La commémoration est un devoir de mémoire.

N. B.

Comment (6)

    Elephant Man
    19 juin 2022 - 15 h 27 min

    Excellente contribution.
    L’enseignement de l’Histoire de l’Algérie dans son intégralité doit se faire dès le plus jeune et effectivement la commémoration.
    «Le devoir de mémoire est un impératif catégorique. On ne peut parler de la construction de la mémoire collective sans la lier à l’importance de la commémoration.».
    Excellente conclusion.

    emigre de France
    18 juin 2022 - 11 h 11 min

    La mémoire procède de l’écriture de l’Histoire par les puissants. Si l’Algérie veut se rappeler son passé, alors qu’elle donne des noms de rue à tous ses enfants morts pour elle – autochtones ou étrangers -, qu’elle emplisse les livres d’histoire des exploits qu’ils ont réalisés depuis la nuit des temps et qu’elle mette en lumière les colonisateurs, tous les colonisateurs, y compris les Arabes ! En bon musulman, j’ai grandi avec « ali fat mat » et « brabi nchallah », deux maximes qui annihilent le passé et le futur et m’ont réduit au présent, sans mémoire et, ce qui est plus grave, sans perspective !

      Chaoui
      19 juin 2022 - 12 h 18 min

      A « l’immigré de France » :

      On est bien d’accord avec toi ! L’Algérie d’écrire SON Histoire. Toute son Histoire. Rappeler ses faits glorieux au moins vertueux. Des périodes de paix comme de guerre. Écrire l’Histoire en veillant soigneusement à employer les termes appropriés.
      Sur le propos, il est inexact de qualifier l’arrivée des arabes en Algérie de « colonisateurs » au sens où il est constant qu’ils n’y ont pas implanté et déversé des colonies de peuplement, tout au plus envahisseurs ont-ils été dont le contingent le plus important s’en fut reparti d’où il est venu, nous laissant leur langue que nous finirons par non pas tant adopter mais adapter en la mêlant à la nôtre propre.
      Quant aux expressions que tu invoques, erreur est de les prendre au premier degré. « Li fat mat » ne veut pas tant dire oublie mais invite à relativiser, le mal comme le bien ne s’oubliant jamais aussi sûr que ce qui est propre à un homme ne se peut d’une Nation entière. Il en va autant de l’expression populaire « b’Rabi n’ch’Alla » qui nous renvoie à l’espoir sans pour autant nous dispenser d’agir et de penser par nous-mêmes de notre vivant sur terre au sens où elle s’inspire de métaphysique.
      Il en est de même du temps présent qui ne se limite pas à l’actuel pour venir du passé et projeter l’avenir.
      Enfin ! Ce qui nourrit l’Homme et le renforce c’est le Savoir. Tous les Savoirs. Apprendre à tout âge.

        Elephant Man
        20 juin 2022 - 4 h 18 min

        @Chaoui
        Excellente conclusion « Enfin ! Ce qui nourrit l’Homme et le renforce c’est le Savoir. Tous les Savoirs. Apprendre à tout âge.».

    Belveder
    18 juin 2022 - 10 h 50 min

    Ce travail aurait du etre confié dés 1962 a des historiens universitaires chercheurs
    pas un Ministere avec des commissions de censure

    Chaoui
    18 juin 2022 - 10 h 32 min

    De la mémoire !

    L’homme est comme l’arbre : sans ses racines, il est emporté par tous les vents…

    Ce sont ces seules racines qui le maintiennent fixement au sol en même temps qu’elles lui fournissent sève, vitalité et résistance. Ce sont ces mêmes racines qui lui assurent vie sur le temps long et le prémunissent de tous les aléas…

    Avoir de la mémoire, c’est avoir une conscience. Et comme les humains, il se trouve que physiologiquement les arbres communiquent bel et bien entre-eux (CQFD). Qu’il en est des grands, des petits, des tordus, de jeunes pouces, des centenaires ou des malades, ils n’en constituent pas moins un ensemble homogène s’autorégulant et qui tire sa quintessence de par son unité.

    Le travail, ici, concernant notre Mémoire doit se fonder sur notre Unité qui, comme toute unité existante sur terre, en fonction des temps et des époques tantôt régresse, tantôt stagne, tantôt de s’épanouir.

    Pour le cas, il siérait que l’on songe à précisément créer un « Observatoire de l’Unité Nationale » qui aurait pour matrice notre Mémoire collective autant que cet instrument pourrait s’assigner un rôle à la fois de veille comme celui de formuler des propositions à la société et aux pouvoirs publics, en synergie avec toutes les forces du pays.

    L’Union fait la force ! Et c’est bien vrai.

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