Un Indien à la tête du Royaume-Uni : à quand un Algérien à l’Elysée ?
Par Karim B. – Il est cultivé. Il est deux fois plus riche que le roi Charles. Il est surtout indien. Le militant pacifiste pour l’indépendance de l’Inde, Mahatma Gandhi, peut enfin reposer en paix. Soixante-quatorze ans après sa mort tragique, un des siens a fait mieux. Rishi Sunak, le nouveau Premier ministre du Royaume-Uni, est parti de rien et est arrivé au 10, Downing Street à un moment fatidique de l’histoire contemporaine de cette grande puissance mondiale dont l’économie est agonisante.
L’élection du nouveau chef du Parti conservateur est l’aboutissement d’un long processus politique et social dans un pays connu pour être plus libre que la France voisine, où les interdits se multiplient et les communautés ghettoïsées par des politiques d’intégration marquées par des échecs cuisants qui menacent d’une implosion, au regard du climat d’insécurité qui y règne et du discours haineux et xénophobe véhiculé par les médias dominants.
Rishi Sunak a été précédé par Sadiq Khan, membre du Parti travailliste, élu maire de Londres en mai 2016, ouvrant ainsi la voie toute grande à celui qui occupera, cinq ans plus tard, la plus haute fonction politique, après la démission de la furtive Liza Truss, qui a claqué la porte tellement la situation paraît impossible à redresser. Elle laisse, elle et son prédécesseur Boris Johnson, une Grande-Bretagne à genoux.
Le climat social et politique en France ne semble pas privilégier l’arrivée d’un Français d’origine algérienne au pouvoir. «Algérienne» car les Algériens constituent, pour des raisons historiques évidentes, la première communauté étrangère hors Europe dans ce pays miné par le racisme et réfractaire à une politique d’immigration intelligente, incapable de prendre exemple sur les pays anglo-saxons où tout citoyen utile est le bienvenu à quelque poste que ce soit, y compris celui de Premier ministre donc. On a vu quelques ministres algériens çà et là, nommés par les présidents successifs, de gauche et de droite, surtout depuis l’arrivée de Nicolas Sarkozy au pouvoir en 2007, moins pour leur compétence que comme une sorte d’alibi – Azouz Begag l’a dénoncé en son temps – pour dessiner une égalité des chances en trompe-l’œil et camoufler la fronde qui va en grandissant dans les banlieues livrées à elles-mêmes, oubliées des programmes de développement et ostracisées par une caste dominante qui monopolise le pouvoir et ne compte pas le céder à des personnes issues d’autres milieux que ceux de la classe supérieure.
Le système est rodé depuis la création de grandes écoles réservées exclusivement à une catégorie de Français, dits de souche, dans ce qui s’apparente à un système héréditaire quasi monarchique, dans lequel les anciens lèguent les centres de décision civils – Sciences Po, Poly Tech, HEC, Normal Sup, ENA, etc. – et militaires – Saint-Cyr – aux futurs cols blancs, pantouflards, pieds nickelés et autres repêchés du réseautage qui auront pour missions essentielles d’entretenir le système, de maintenir les écarts, de sauvegarder la logique des classes, de tenir à l’écart les millions d’étrangers maghrébins et africains qui, bien qu’ayant souvent prouvé leur supériorité culturelle sur celle des «autochtones», n’en sont pas moins perçus comme une menacepour l’équilibre de la société française, vouée à un statu quo que les dirigeants politiques, de quelque bord qu’ils soient, s’échinent à préserver et à protéger «quoi qu’il en coûte».
A quand un Algérien à l’Elysée ? Jamais. En tout cas, tant que la monarchie française déguisée persévérera sur cette voie insidieusement ségrégationniste.
K. B.
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