Voici pourquoi la prise du pouvoir par l’extrême droite en France est inévitable
De Paris, Mrizek Sahraoui – Pourquoi ? C’est bien simple, c’est parce que l’extrême droite s’est diablement dédiabolisée (en apparence seulement bien sûr), les leaders de cette mouvance ont, là c’est un fait, abandonné les thèses négationnistes, ne cherchent plus à provoquer des dérapages verbaux, ni ne font des déclarations sur les chambres à gaz et la Shoah. En somme, l’extrême droite française n’est plus antisémite, elle est désormais exclusivement anti-arabe, antimusulmane et anti-immigrés. Cela change tout et ouvre toutes grandes les portes du pouvoir.
Si cela ne suffit pas, il faut regarder de très près les résultats des derniers scrutins électoraux. Notamment à l’occasion de la présidentielle de 2022, la candidate du Rassemblement national (RN) a recueilli 42% des suffrages, soit plus de 13 millions de voix. Un résultat qui traduit en lui-même une éclatante victoire. Et dans l’infini domaine de l’inédit, ce même parti a réussi à envoyer 89 députés à l’Assemblée nationale, 18 au Parlement européen, et plusieurs centaines d’élus dans les conseils municipaux, départementaux et régionaux. En clair, le loup est d’ores et déjà dans la bergerie.
Plusieurs éléments factuels permettent, par ailleurs, d’affirmer que cela relèverait du miracle si l’extrême droite ne venait pas à accéder au pouvoir en 2027. D’abord, outre que cette dernière s’est départie des positions antisémites, à présent, les avocats, au sens propre comme au figuré, et les farouches défenseurs des mouvements nationalistes revendiquent ouvertement leur double nationalité, française et israélienne. Le grand paradoxe du XXIe siècle.
«L’antisémitisme n’est plus à l’extrême droite», martèle par exemple de façon récurrente Gilles-William Goldnadel, avocat, essayiste, accessoirement chroniqueur chez CNews et Le Figaro, deux médias, à l’instar de Valeurs Actuelles et Europe1, patemment au service et porte-voix officiels de l’extrême droite française. Posture partagée par la directrice du magazine extrémiste Causeur, Elizabeth Levy, la fervente adepte de la théorie du «nouvel antisémitisme», thèse inventée, portée et serinée ad nauseam à chaque occasion médiatique par les réactionnaires Pierre-André Tagguieff, Alain Finkielkraut et l’innommable Bernard Henry-Levy.
Ensuite, l’irruption de la candidature de celui qui a, en quelques semaines, élargi la fenêtre d’Overton a apporté, il faut bien l’admettre, un souffle nouveau aux partis d’extrême droite, désormais faisant partie intégrante de la vie politique française au même titre que les partis républicains classiques. En effet, aux yeux d’un très grand nombre de Français, Eric Zemmour n’est pas le banal héros picaresque d’une farce politique. Il est perçu comme celui qui pose, un à un, les jalons d’une alternative crédible au Président actuel, aidé dans sa conquête du pouvoir par des oligarques propriétaires d’une pléthore de médias très influents, de hauts gradés de l’armée à la retraite, de hauts fonctionnaires de police et des services de renseignement et, bien évidemment, par des dizaines de milliers de militants aguerris. Tout un monde partageant les mêmes convictions, aspirant à une France débarrassée de toute présence des immigrés.
Aussi, après que les militants de la droite dite républicaine (LR) ont mis le dernier clou sur le cercueil du parti, en le confiant au député raciste Eric Ciotti après un scrutin interne organisé les week-ends derniers, l’union des droites tant espérée par Zemmour est, elle aussi, à terme inévitable. Ce sera : racistes, extrémistes, nationalistes, souverainistes de toute la France, unissez-vous.
Et à l’évidence enfin, Emmanuel Macron, fort probablement dernier président républicain avant l’avènement du fascisme, porte une lourde responsabilité de la montée fulgurante de l’extrême droite, tancent beaucoup de commentateurs qui lui reprochent de ne pas avoir tenu la promesse qu’il avait faite, en 2017, d’éradiquer l’extrême droite. Sous le règne chaotique d’Emmanuel Macron, il n’est pas rare, en effet, de croiser dans le même café un immigré et un électeur du Rassemblement national.
C’est la banalisation rudement et rondement menée depuis des années qui mène pas à pas au palais de l’Elysée.
M. S.
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