Quel message l’ambassadrice des Etats-Unis à Alger a-t-elle voulu faire passer ?
Par Abdelkader S. – On a beau lire, en long, en large et en travers, l’interview conjointe que l’ambassadrice des Etats-Unis à Alger a accordée à nos confrères d’El-Watan et d’El-Khabar, on n’arrive pas à deviner ses véritables intentions. Contredisant par les mots les actes hostiles et belliqueux commis par l’hégémonique establishment américain, le service de communication d’Elizabeth Moore Aubin a eu tout le mal du monde à trouver les formules pour tenter de convaincre de la bonne foi de la représentation diplomatique américaine dans notre pays. Mais l’approche est, il faut l’avouer, intelligente.
En effet, l’ambassadrice a concentré son entretien sur les relations économiques et culturelles auxquelles elle a consacré les trois quarts de son intervention, réduisant au strict minimum ses commentaires à propos des sujets internationaux qui fâchent et qui divisent profondément Alger et Washington, notamment la question palestinienne dont l’Algérie a fait son cheval de bataille dès l’entame de son mandat au Conseil de sécurité de l’ONU, en tant que membre non-permanent. Aubin a insisté sur la nécessité d’un dialogue «respectueux» entre les deux capitales. Qu’est-ce à dire ? D’où pourrait venir l’attitude impertinente ? Pas de l’Algérie, en tout cas, connue pour son sens de la retenue et son éloignement de la diplomatie du spectacle, comme le soulignait l’ancien ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra. Serait-ce une menace larvée ?
Contrairement à ce qu’affirme l’ambassadrice des Etats-Unis, Alger et Washington ne sont d’accord sur rien dans tous les dossiers qu’elle a évoqués. Aubin s’est essayée à un périlleux exercice consistant à trouver des points de convergence dans les positions des deux capitales au sujet de la Libye, du Sahel, du Sahara Occidental et de Gaza, mais l’effort est vain. «L’Algérie et les Etats-Unis conviennent que l’envoyé spécial de l’ONU devrait avoir l’espace et l’opportunité de travailler pour une solution politique au Sahara Occidental», a-t-elle soutenu, omettant de préciser que son pays, qui fait avancer le plan de normalisation avec Israël au pas de charge, a offert au Maroc de reconnaître sa pseudo-souveraineté sur les territoires sahraouis en contrepartie de son adhésion à cette allégeance de pays arabes à l’entité sioniste, conduite par les Emirats.
«Concernant la situation en Palestine, les Etats-Unis et l’Algérie soutiennent pleinement l’objectif d’une solution à deux Etats», a, en outre, indiqué l’ambassadrice des Etats-Unis, en faisant état d’une «préoccupation extrême» qui serait partagée par les deux pays au sujet de «la situation humanitaire à Gaza». Elle va encore plus loin dans la contrevérité, en assurant que les Etats-Unis «travaillent très dur pour apporter de l’aide aux Palestiniens», alors que tout le monde sait que le régime nazi de Benyamin Netanyahou n’aurait pas pu s’adonner impunément aux atrocités en cours à Gaza, sans le parrainage de l’administration Biden qui les couvre honteusement par son ignominieux veto au Conseil de sécurité.
«Comme au Sahel, les Etats-Unis et l’Algérie voient la situation en Libye de manière très similaire. Nous sommes tout à fait d’accord sur le fait que le peuple libyen devrait pouvoir décider de son gouvernement et de son avenir. Et nous sommes également d’accord sur le fait que les forces étrangères sont déstabilisatrices et n’aident pas le peuple libyen à décider de son avenir. Nous sommes donc tout à fait d’accord avec le gouvernement algérien et nous en parlons fréquemment avec lui», a encore dit Elizabeth Moore Aubin. Or, là aussi, il est de notoriété publique que les Etats-Unis sont loin de faire partie de la solution à la crise libyenne qui s’éternise ; ils sont plutôt le principal obstacle qui annihile tout espoir de parvenir à une paix durable dans ce pays où près d’une dizaine de puissances étrangères se livrent une guerre par procuration. A leur tête, celui d’Aubin.
A. S.
Comment (34)